À l'affiche, Critiques // Racine ou la leçon de Phèdre d’Anne Delbée, mise en scène d’Anne Delbée, au théâtre de la Contrescarpe

Racine ou la leçon de Phèdre d’Anne Delbée, mise en scène d’Anne Delbée, au théâtre de la Contrescarpe

Mai 05, 2016 | Commentaires fermés sur Racine ou la leçon de Phèdre d’Anne Delbée, mise en scène d’Anne Delbée, au théâtre de la Contrescarpe

Article de Victoria Fourel

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© DR

Apprentissage du personnage, de la lecture, de l’amour, du jeu. Anne Delbée

tente avec ce spectacle éducatif, cette quasi-conférence, de nous faire entendre la vie du poète, ses tiraillements, et toutes les finesses de sa plume.

L’auteure-metteure en scène a une présence singulière. Sans âge, sans sexe, visage penché, yeux mi-clos, elle dégage quelque chose de captivant, entre le professeur, l’historien, le fantôme de Racine, peut-être. La force dégagée par son personnage est seulement appuyée par une scénographie sobre, en accord avec la leçon. Des panneaux métalliques, destinés à refléter la lumière et à servir d’appui à cette maîtresse à penser. En laissant toute la place au mouvement créé par la parole, la comédienne devient l’exact centre du plateau, où qu’elle soit.

Cette maîtresse à penser, donc, amoureuse et conteuse du vers racinien, donne les clés pour jouer son théâtre, et en profite pour épingler ceux qui ne le comprennent pas. On ne peut pas la blâmer de vouloir transmettre, mais en revanche, lorsque les voyelles sont toutes, sans exception, longues, lorsque la voix se fait chevrotante, lorsque les gestes se font illustrations, là, on est face à un problème. Car sa leçon parlent des « croutons », qui chercheraient à préserver Racine dans son formol, quand elle choisit de le dépoussiérer. On peut jouer Racine sur du blues, avec une casquette, bref, Racine, et on le comprend, le théâtre, peut se manger à toutes les sauces. Oui, ô oui, on le peut. Mais c’est là sa contradiction : à l’inverse, elle le dit elle-même, le texte a été écrit pour être joué comme « ça ». A savoir avec les liaisons, dans une langue déliée, etc. Ainsi, elle nous dit sans détours la bonne façon de faire, avant de s’en prendre à ceux qui ne connaissent que leur bonne façon de faire. C’est discutable.

Certains passages sont savoureux et font entendre un classique qu’on retrouve. La vie de Racine, aussi, prend une part importante du spectacle. On ne peut qu’être heureux de nous pencher sur les liens entre tragédie sur le papier et fatalité dans une vie d’homme. Mais là encore, le plaisir de raconter déborde sur la sobriété, dans l’écriture comme dans le jeu. Les yeux qui se ferment, les métaphores un peu ampoulées (Racine est, dans le texte,  »une étoile montante dans le soleil du XVIIème »). Il y a quelque chose de peu moderne dans la forme de cette déclaration d’amour. L’interprétation que fait Anne Delbée de Racine, et de sa Phèdre est pertinente, elle interpelle, aussi, lorsqu’on la considère comme une possibilité qui nourrit notre lecture. Mais le tout est trop figé, trop linéaire pour que l’on ressorte avec une réelle faim de ce vers, que la comédienne nous dit pourtant avec beaucoup de plaisir.

Racine ou la leçon de Phèdre
Texte Anne Delbée
Mise en scène Anne Delbée
Avec Anne Delbée
Reprise les mardis à 19h30 et les dimanches à 15h30

Théâtre de la Contrescarpe
5 rue Blainville 75005 PARIS
Métros Place Monge (ligne 7), Cardinal Lemoine (ligne 10), Luxembourg (RER B)
Réservation 01 42 01 81 88
www.theatredelacontrescarpe.fr

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