Critiques // « Playhouse» de Martin Crimp, mise en scène de Rémy Barché, au Théâtre de Belleville

« Playhouse» de Martin Crimp, mise en scène de Rémy Barché, au Théâtre de Belleville

Mai 19, 2015 | Commentaires fermés sur « Playhouse» de Martin Crimp, mise en scène de Rémy Barché, au Théâtre de Belleville

ƒƒ article de Victoria Fourel

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Treize scènes qui racontent une vie de couple dans les remparts de son intérieur et de sa routine, où l’absurde fait souvent un pas et où l’on devient fou à ‘partager sa vie’. Ce pitch, autant que la forme du spectacle, est limpide. Ces treize fragments de moments ordinaires suivent Katrina et Simon, et interrogent le côté magasin de jouets de la vie de couple, et le circuit fermé anxiogène qu’elle représente. On est d’abord happé par le rythme de cette pièce courte, où les transitions, même si elles ne sont pas complètement novatrices, nous embarquent dans les moments de quotidien avec une grande énergie. « Se brosser les dents », « Nettoyer le réfrigérateur »… Tout est synonyme de folie douce, et de surprise. Cette énergie tient beaucoup aux comédiens, qui tiennent une ligne de jeu très tendue pendant tout le spectacle. Que l’on soit sensible ou pas à leur parole de Ken et Barbie, on est forcément épaté par leur engagement, leur densité, leur technique.

On apprécie aussi que cette maison de poupée, où les personnages se projettent et s’enferment, joue sur deux registres : un côté réaliste, choquant et surprenant parfois, avec des images et des idées très fortes, et un côté qui fait jouer l’imaginaire du spectateur, grâce à ce décor posé sur un plateau, où l’on voit les accessoires pas encore utilisés, le vide autour de leur appartement… Ainsi, on ne se laisse jamais étouffer par le propos, qui peut être rude s’il est pris au pied de la lettre, et en même temps, on est sans cesse surpris, questionné, amusé.

Il est évident que si l’on est pas d’entrée emporté par la chute de ces amoureux, et si l’on ne rêve pas de voir jusqu’où ira cette chute, alors forcément, les moments de violence, les hésitations entre vraie vie et fantasme, tout ça peut donner la sensation d’être laissé pour compte. Le texte, comme la mise en scène, n’explique rien, et laisse une marge énorme de réactions au spectateur. On peut ainsi avancer que le spectateur n’est pas toujours assez ‘dirigé’, si l’on peut dire, et que le propos (ou l’absurde) est parfois brouillé dans un trop plein d’enchaînements des différentes scènes, trop plein d’accessoires, de moments inattendus et d’énergie.

Pourtant, Playhouse marque surtout l’esprit comme un vivier d’émotions, et une formidable peinture des dangers d’avoir un intérieur, des voisins, une vie de couple, une routine. C’est un spectacle à la fois technique et fou, à la fois concret et franchement poétique, bref, c’est un spectacle entier.

Playhouse
Texte Martin Crimp
Mise en scène Rémy Barché
Avec Myrtille Bordier et Tom Politano, et la voix de Paulette Wright

Du 11 avril au 26 juin,
du mardi au samedi à 19h30, le dimanche à 20h30
Relâche les 7, 8, 9, 19, 20, 21,13 juin
Théâtre de Belleville
94, rue du Faubourg du Temple – 75011 Paris
Métro Belleville (ligne 2 et 11) et Goncourt (L11)
Réservation 01 48 06 72 34
www.theatredebelleville.com

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