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Orchestre Titanic, de Hristo Boytchev mise en scène de Philippe Lanton, au Théâtre de l’Aquarium

Jan 14, 2017 | Commentaires fermés sur Orchestre Titanic, de Hristo Boytchev mise en scène de Philippe Lanton, au Théâtre de l’Aquarium

ƒ Article de Victoria Fourel

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©Patrick Berger

Quatre clowns, quatre pantins, quatre personnages dans une gare déserte et désertée, où les trains ne s’arrêtent même plus. Ils ont une hiérarchie, des souvenirs et des envies, mais arriveront-ils jamais à sortir de la boucle qu’ils semblent répéter sans cesse ? Avec l’arrivée d’Harry, illusionniste, prophète et alcoolique, peut-être, le départ prochain ?

Sur le papier, il semble y avoir beaucoup de choses dans ce projet. Absurde destin raconté entre illusion et réalité crue, Orchestre Titanic dit quelque chose de l’attente, du but d’une vie, de la fatalité, mais aussi de notre faculté à chambouler ces notions ordinaires par l’incursion de la magie, de la folie, ultime refuge peut-être, pour garder l’espoir. Il y a Godot, il y a Shakespeare, il y a le clown et le marin, le classique et le très moderne.

Et en scène, cette multitude de lectures et d’influences sont presque trop nombreuses. Dans un décor simple, mais plein de trouvailles, l’espace évolue, l’imaginaire et le bricolage travaillent, dans une sorte de reconstitution de théâtre de rue très charmant. On est impressionné par la lumière, chargée d’un rôle capital. Elle éclaire les visages marqués, les faisant ressembler à des masques, elle crée le relief, le volume. C’est très beau, mais les personnages clownesques et solitaires ont du mal à venir jusqu’à nous. Disparaissant parfois presque dans l’ombre, ils nous surprennent souvent, mais ne parviennent pas toujours à se dégager de l’immense plateau, et de l’humour noir d’une telle histoire. On rit mais on ne parvient pas à s’attacher vraiment, on les trouve d’une justesse folle mais ensuite, un peu enfermés dans le seul caractère qui leur est attribué. Dans cette fable existentielle, drôle, incompréhensible, on est charmé par le niveau technique, mais aussi souvent laissé pour compte. Et dans ces cas-là, on se retrouve souvent à chercher du sens à tout prix, ce qui n’est pas toujours une bonne idée au théâtre.

L’arrivée d’un prophète qui promet de les aider à partir, qui enchaîne les tours de passe-passe et les traite en élus nous renvoient à de nombreux personnages et à de nombreux thèmes. La religion qui tend à l’idolâtrie, et notre besoin d’être puni pour nos péchés, la disparition dans quelque chose ou quelqu’un, notre dépendance vis-à-vis des autres, de Dieu, de nos addictions, que l’on masque derrière un prétendu goût pour la solitude. Ce texte, instantané d’une Europe de l’Est prête à s’intégrer mais encore laissée en marge, est d’une grande richesse, et laisse monter tout au long du spectacle une grande poésie. Se transformant en quatuor à cordes sous l’impulsion d’Harry, nos quatre clochards célestes se prennent soudain pour l’orchestre du Titanic, qui joua jusqu’au bout. Cette image est belle, comme d’autres, mais les répétitions, les personnages un peu bloqués, la densité de ce propos complètement absurde empêchent le lien. Ce lien que cherchent pourtant désespérément les personnages.

Orchestre Titanic
Texte Hristo Boytchev
Mise en scène Philippe Lanton
Avec Bernard Bloch, Olivier Cruveiller, Philippe Dormoy, Christian Pageault, Evelyne Pelletier.

Du mardi 10 janvier au dimanche 5 février 2017.
Du mardi au samedi à 20h, le dimanche à 16h.

Théâtre de l’Aquarium
La Cartouherie – Route du Champ de Manœuvre 75012 PARIS
Métro Château de Vincennes, puis navette régulière ou bus 112
Réservation 01 43 74 99 61
www.theatredelaquarium.net

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