© Agathe Poupeney
f article de Denis Sanglard
Adaptation du roman éponyme d’Horace McCoy, roman sorti en 1935, adapté par Bruno Bouché, Clement Hervieux-Leger et Daniel San Pedro dans une volonté transdisciplinaire où la danse et le théâtre seraient le corolaire l’une de l’autre, sans distinction, réunis dans un geste dramaturgique, une narration dramatique. On se souvient dans cette volonté de la réussite éclatante du [le] Bal par le Théâtre du Campagnol en 1981, adapté ensuite pour le cinéma par Ettore Scola en 1983. Le choix de ce roman où la danse est le sujet même du récit semblait aller de soi, heureuse idée se dit-on. Seulement voilà, l’impression pugnace au bout de plus d’une heure de ce galop d’essai en soit fort bien troussé malgré tout, est celle d’une grande frustration. Par la faute sans doute d’une trame narrative bien trop lâche qui ne permet nullement une réelle incarnation des personnages, encore moins une tension dramatique que la danse, qui aurait pu l’exacerber, n’apporte malheureusement pas ici, ne compensant en rien les enjeux dramatiques du roman. La danse comme état des lieux des relations entre les personnages, de leur dégradation physique et morale, la relation singulière entre Gloria et Robert reste à l’état d’ébauche, comme la personnalité de chacun réduite à peu de chose, sans profondeur ni relief réels, sans vérité théâtrale accusée, qui rend de fait incompréhensible le meurtre de Gloria, « Tue moi, c’est le seul moyen de me sortir de ma misère », abattue par son partenaire comme il a vu dans son enfance son grand-père abattre une jument blessée. Mais de cette explication qui donne au roman son titre, il n’en est ici rien dit.
De ce marathon de danse tragique, condensé en 1h25, il ne reste de prégnant que des séquences chorégraphiées au cordeau, danses de salon mâtiné de rock et de quelques envolées classiques étonnantes, où la fatigue et l’épuisement sont joués au mieux. Il manque cependant l’image d’une réelle déglingue de corps poussés à bout, épuisés par 63 jours non-stop de compétition et d’humiliation. Le Ballet de l’Opéra du Rhin n’a rien à se reprocher mais cette perfection propre au ballet qui malgré elle transpire au long de cette création obère de facto un climax qui ne vient pas, ne monte que difficilement, ou reste peu crédible, qui aurait mérité pourtant plus d’âpreté, de violence, de cruauté, voire de sauvagerie, de noirceur, de crasse et de sueur. C’est, en un mot, bien trop propre et formaté, sans la noirceur âcre du roman. Il y a pourtant des échappées surprenantes et décalées, un solo classique en tutu et chaussons, plus loin une farandole pour un mariage impromptu, clin d’œil Pina Bauschien évident retrouvé dans l’esquisse d’un geste à mille autres reconnaissable, ce poing serré et se crispant exprimant l’hiver. Sans doute aurait-il fallu pousser en ce sens, trahir l’œuvre, ce roman noir, plutôt que cette adaptation qui se voudrait fidèle mais reste bien trop en surface, trop lisse pour nous arracher la moindre émotion.
© Agathe Poupeney
On achève bien les chevaux, d’après le roman d’Horace McCoy
Adaptation, mise en scène et chorégraphie de Bruno Bouché, Clément Hervieux-Léger et Daniel San Pedro
CCN. Ballet de l’Opéra du Rhin
Compagnie des Petits-Champs
Assistant mise en scène et dramaturgie : Aurélien Hamard-Padis
Costumes : Caroline de Vivalse
Scénographie : Aurélie Maestre, Bogna G.Jaroslawski
Lumières : Alban Sauvé
Son : Nicolas Lespagnol-Rizzi
Répétiteurs : Claude Agrafeil, Adrien Boissonnet
Coach vocal : Ana Karina Rossi
Avec, par ordre d’apparition : Luca Besse, Vincent Breton, Daniel San Pedro, Marin Delavaud, Susie Buisson, Alexandre Plesis, Muriel Zusperreguy, Louis Berthélémy, Ana Enriquez, Clémence Boué, Josua Hoffalt, Juli Weiss, Marwick Schmitt, Claude Agrafell
Les Concurrents :
Becker Audrey & Waysenson Hénoc
Buisson Susie & Riviere Jean-Philippe
Coin Noemi & Jeammot Erwan
Enriquez Gonzalez Ana Karina & Pierre-Emile Lemieux-Venne
Fukuda Brett & Lozano Miquel
He Di & Julliard Rubén
Mendo Dias Marta & Lyon Jesse
Olivier Nirina & Reiners Avery
Nummi Leonora & Rupp Cédric
Pernão Alice & Mandogana Khanya
Weiss Julia ( Mattie) & Schmitt Marwik
Xing Dongting & Shimizu Ryo
Lara Wolter & Alain Trividic
Covers : Nour Mathis, Frias Cauê
Les musiciens : M’hamed El Menjra, Noé Codjia, David Peycha, Maxime George
Et au chant : Alice Pernão
Du 1er au 5 avril 2025 à 20h
Samedi 15h / 20h
Durée 1h25
Théâtre de la Ville-Sarah Bernhardt
Place du châtelet
75004 Paris
Réservation : 01 42 74 22 77
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