À l'affiche, Critiques // Ogres, de Yann Verburgh, mise en scène de Eugen Jebeleanu, à Théâtre Ouvert

Ogres, de Yann Verburgh, mise en scène de Eugen Jebeleanu, à Théâtre Ouvert

Sep 25, 2017 | Commentaires fermés sur Ogres, de Yann Verburgh, mise en scène de Eugen Jebeleanu, à Théâtre Ouvert

 © Christophe Raynaud de Lage

ƒ article de Denis Sanglard 

Ogres de Yann Verburgh dresse un état des lieux de l’homophobie ordinaire à travers le monde. Avec pour pivot central l’histoire de Benjamin, torturé, brûlé vif et laissé pour mort dans un bois de Rouen. Les conséquences traumatiques, physiques et sociales. Le procès. Mais aussi toutes les victimes anonymes ou non, de l’Iran à la Russie, du Brésil à l’Ouganda, de la Grèce à la France. Entre l’intime et le politique Yann Verburgh confronte les faits et les points de vue. Paroles de bourreaux, paroles de victimes, paroles de proches. Il y a les morts. Il y a les résistants, ceux qui luttent et dénoncent au péril de leur vie. Les exilés. Et la peur qui taraude, ronge devant l’intolérance, la violence. La résilience aussi, l’amour qui surgit, vous tient debout au mépris des lois qui condamnent et tuent. Constat glaçant d’une homophobie ordinaire, actée au sein de sociétés, y compris la nôtre, où la tolérance envers les minorités sexuelles résiste difficilement au tabou qu’elle révèle. Eugen Jebeleanu signe une mise en scène sobre, fluide, voire élégante, au risque d’émousser son sujet. Lisse. Rien de vraiment âpre, cru, rien qui ne  choque – dans le bon sens du terme – hors la parole énoncée. Certes cette parole est un uppercut sans appel, mais la difficulté de ce texte, cette accumulation de récits et témoignages épars au facteur commun, miroir éclaté d’un même fait, l’homophobie, semble piéger, enfermer le metteur en scène qui s’en contente, illustre sans éclat et au pied de la lettre le récit, ne sortant jamais de ce cadre dramaturgique contraignant. On aurait aimé un véritable engagement, un point de vue critique, polémique et affirmé, quitte à faire débat, que cette simple illustration de faits et témoignages au demeurant fort bien troussée mais sans audace… Eugen Jebeleanu, on le devine, est sincère dans ses intentions de dénoncer la violence homophobe, on ne peut le lui reprocher. Mais on reste ainsi et c’est dommage à la surface des choses. Dans le constat et rien que le constat. Cela  reste superficiel et nous sommes frustrés, passée la sidération devant la violence des faits énoncés, pourtant connus – souhaitons-le – devant un sujet qu’on aurait vraiment aimé voir approfondi par une mise en scène plus audacieuse, voire critique. L’engagement des acteurs n’y est pour rien, ils défendent au mieux, voir même très bien, ce texte. Mention spéciale à la sensibilité de Radouan Leflahi, vu chez Thomas Jolly et David Bobée, à la présence fébrile, aussi épatant en militant LGBT volontaire que terrifiant en homophobe et bourreau « ordinaire ». Reste un texte à découvrir pour son propos militant et son constat sans appel sur la discrimination, la violence faite aux minorités sexuelles, pratiques homophobes conscientes, sociales, institutionnalisées, politiques.

 

Ogres de Yann Verburgh

Mise en scène de Eugen Jebeleanu
Avec Gautier Boxebeld, Clémence Laboureau, Radouan Leflahi, Ugo Léonard, Claire Puygrenier
Création sonore  Rémi Billardon
Scénographie  Velica Panduru

Du 22 septembre au 7 octobre 2017
Mardis et mercredis à 19h. Du jeudi au samedi à 20h.
Théâtre Ouvert
Centre national des Dramaturgies Contemporaines
4bis cité Véron
75018 Paris

Réservations 01 42 55 74 40
www.theatre-ouvert.com
accueil@theatreouvert.com

En tournée :
30 mars 2018 Théâtre Joliette-Minoterie, Marseille, dans le cadre de la biennale des écritures du réel #4
24 et 25 mai 2018 L’Etincelle, Théâtre de la ville de Rouen
Saison  2017/2018 Théâtre de Vanves, Festival Ardanthé

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