© Simon Gosselin
ƒƒ Article de Garance
Et une fois qu’on arrive en haut ? Notre mère-société nous apprend la passion de l’ascension, la version la plus perfectionnée de soi-même. Tendre à devenir auto-suffisant et bien sûr montrer l’exemple, devenir une image accomplie et se transformer en statut iconique. Se figer dans le temps. Mais une question reste en suspens : que ce passe-t-il, que faire là-haut ? Alice (interprété par Arthur H) se confronte à cette angoisse qui semble le concerner directement : un chanteur adulé se retrouve piégé dans une routine, poussé au bord du gouffre de l’aigreur. Déclic soudain, la détresse de cet homme est symptomatique d’une génération rongée puis égarée entre deux flots. La tempête existentielle fait son chemin tranquillement, mais comment éviter la chute mortelle ? Ou plutôt comment revenir de ce purgatoire psychotique.
Casser, arracher, bouleverser les conventions théâtrales pour mieux faire miroiter cet instinct abyssal qu’il faut faire bouger les choses, ne pas se laisser endormir par la routine. Briser l’épine dorsale du classicisme. À la manière d’un chœur, euripidien mais modernisé, chaque personnage a sa voix à porter, voix qui altérera profondément l’évolution des événements. Alice, le Coryphée, par la mise en scène de sa propre mort, modifiera la dynamique, la logique du rôle de protagoniste. Ce sacrifice nécessaire permet de mettre davantage en lumière les personnages qui gravitent autour et ainsi faire dérouter du schéma traditionnel narratif.
Les coutumiers Deus sont remplacés par les techniciens, normalement effacés du processus créatif et dépossédés du visible, qui en manipulant la scénographie et donc l’espace décident et dessinent le destin dans lequel les choses pourront ou non évoluer.
Mort prématurée d’un chanteur populaire dans la force de l’âge est un cyclone qui fait voltiger les personnages dans une histoire qui leur échappe, les dépasse et les enseveli. Tous s’entrechoquent et nous essayons de ne pas nous faire happer par cette énergie brûlante. Cependant quelques envolées lyriques discordent par rapport à la quiétude de certains événements.
Le thème se montre d’abord comme narcissique, éloigné de la réalité. Destiné aux artistes et au milieu culturel. Et le fond germe doucement, avec difficulté, mais plus clairement : comment ne pas laisser la créativité, les êtres se faire broyer par la machine industrielle, la volonté de productivité et d’efficacité au détriment de la qualité, finalement mieux filtrer la culture qui nous est offerte. Puis les artistes nous apparaissent comme les ambassadeurs, les portes paroles de la race humaine venant se confronter directement à la mort. Les procédés techniques sont opulents et nous font poser la question du sens profond du texte. Sans ses artifices resterait-il quelques cadavres de mots dans nos têtes ?
Mort Prématurée d’un chanteur populaire dans la force de l’âge, écrit et mis en scène par Wajdi Mouawad
Avec Marie-Josée Bastien ou Linda Laplante, Gilles David, Arthur Higelin, Pascal Humbert, Isabelle Lafon, Jocelyn Lagarrigue, Patrick Le mauff, Sara Llorca
Chansons originales Arthur H
Musique originale Pascal Humbert
Assistanat à la mise en scène Valérie Nègre
Dramaturgie Charlotte Farcet
Conseil artistique François Ismert
Scénographie Emmanuel Clolus
Son Michel Maurer et Bernard Valléry
Costume Emmanuelle Thomas, Assisté d’Isabelle Flosi
Maquillage, coiffure Cécile Kretschmar
Suivi du texte Marie Demesy
Lumières Éric Champoux
Du 13 novembre au 29 décembre 2019
Du mardi au samedi à 19 h 30* et le dimanche à 15 h 30
Relâche le mardi 24 et le mercredi 25 décembre 2019
Audiodescription les mardi 3 à 19 h 30 et dimanche 8 décembre à 15 h 30
*en raison de la durée du spectacle, les horaires ont été modifiés
Théâtre National de La Colline
15 rue Malte Brun
75020 Paris
Réservation 01 44 62 52 52
www.colline.fr
Tournée :
3 au 4 mars 2020 – Scène Nationale de Châteauroux
26 mars au 5 avril 2020 – Théâtre National Populaire, Villeurbanne
9 et 10 avril 2020 – Anthéa, Antipolis Théâtre d’Antibes
17 et 18 mars 2020 – Théâtre Firmin Gémier – La piscine à l’Opéra de Massy
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