À l'affiche, Critiques // Moi, soldat inconnu, de Grégory Duvall, mise en scène de Philippe Ogouz, Théâtre Montmartre Galabru

Moi, soldat inconnu, de Grégory Duvall, mise en scène de Philippe Ogouz, Théâtre Montmartre Galabru

Sep 01, 2018 | Commentaires fermés sur Moi, soldat inconnu, de Grégory Duvall, mise en scène de Philippe Ogouz, Théâtre Montmartre Galabru

© Brian Jurin-Dutreilly

ƒƒ Article de Corinne François-Denève

 

Août 2018. Depuis quatre ans, combien de pièces sur la Grande Guerre ? Combien de commandes officielles, de spectacles qui placent avant l’artistique l’opportunisme de la commémoration ? Au début de Moi, soldat inconnu, il est vrai que l’on craint le pire. Le metteur en scène a fait le choix de représenter une cagna, sur le front, avec tous les risques que cela comporte (comment rendre, par exemple, une attaque aérienne sans être ridicule ?) Les premières minutes nous rassurent peu. Dans d’assourdissants bruits d’obus, le jeune comédien, en tenue bleu horizon, se jette à terre, maniant son fusil de façon désordonnée, pointant de temps en temps le canon vers la salle (et on espère que l’accessoiriste a été vigilant.) Dans la tranchée, deux soldats, un jeune et un vieux, qui discutent entre deux attaques. S’enchaînent les morceaux de bravoure attendus d’une pièce sur 14-18 : le premier élan patriotique, bientôt battu en brèche, la détresse des femmes, puis leur ingratitude, le dégoût des poilus, la bouffe infecte qu’ils ingèrent, l’indignité de l’État-Major, l’omniprésente peur de la mort – tout cela fait partie du cahier des charges, et certains épisodes (le vol de bottes à un mort) ont été vus ailleurs.

Toutefois, très vite aussi, on se prend à espérer. L’espace est très intelligemment utilisé, la bande son est de qualité, les costumes et les décors soignés, sans verser dans la reconstitution historique gênante. La scénographie, qui dégage un espace vers un lumineux lointain, découpant sur un fond clair la silhouette d’un tout petit arbre, enfantin, dérisoire, faussement optimiste, est même très belle. Le personnage féminin de Marie vient de temps en temps, dans des apparitions fantasmatiques, occuper l’espace de la cagna, en chantant, devisant, cousant – la lumineuse et sensible Amala Landré fait beaucoup pour rendre vibrant et délicat ce personnage.

C’est Grégory Duvall, qui interprète le jeune soldat, qui a écrit la pièce. Il en a fait une histoire intelligente et habile. Très vite, le plaidoyer pacifiste et patriotique se transforme en « buddy movie » couplé à un impossible film d’évasion : deux amis que le hasard a réunis cherchent à s’en sortir – on se doute que cela finira très mal. De fait, la fin est très émouvante, même si l’on peut regretter l’ajout d’un épilogue un peu forcé, un peu pompier, peut-être pour se conformer à la vocation d’un spectacle labellisé « mission centenaire ». Il n’en reste pas moins que la sincérité du propos, le talent et l’engagement des trois comédiens, en font un spectacle plus que recommandable.

 

 

Moi, soldat inconnu, de Grégory Duvall et mise en scène de Philippe Ogouz

 

Avec  Amala Landré, Jean-Claude Robbe, Grégory Duvall

Lumières  André Diot

Son  Michel Winogradoff

Décor  Nils Zachariasen

Costumes  Virginie H

Assistant mise en scène  Brian Jurin-Dutreilly

 

Durée 1h15

Du 29 août au 21 octobre 2018

Du mercredi au samedi à 19h30 et le dimanche à 19h

 

Théâtre Montmartre Galabru

4 rue de l’Armée d’Orient (face au 53 rue Lepic)

75018 Paris

Métro Blanche ou Abbesses

 

Réservations : 01 42 23 15 85

http://theatregalabru.com

 

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