© Pascal Bernheim

ƒƒƒ article de Denis Sanglard

Elle est de retour, toujours aussi irascible ! Marie-Thérèse Porchet, née Bertholet, catholique, raciste, homophobe, sujet aux flatulences, accent suisse (au couteau comme il se doit) en sautoir. Seulement voilà, il faut se méfier du linge sale déposé et lavé par mère. La découverte d’une photo, un homme nu, dans le portefeuille de Christian-Christophe (deux Christ valent mieux qu’un, c’est plus prudent), le fils couvé, voire castré, et c’est la catastrophe. Le fils est gay et l’univers de Marie-Thérèse Porchet s’effondre. Elle voit désormais des truies partout. Entre deux confidences à Jacqueline, amie et souffre-douleur, beaucoup de médisances envers madame Lopez, la voisine portugaise et concierge et de son fils handicapé (Soleil ! jamais sans doute ce seul mot ne fit crouler autant la salle de rire),  la messe et les leçons de catéchisme, les réunions Tupperware où se taille un joli succès la pipette à jus, Marie-Thérèse s’en va en guerre, dézingue à tout va pour préserver sa réputation et ramener son fils dans le droit chemin et son giron. Ça jase sévère dans la ville de Gland. Spectacle culte, voilà 20 ans que Marie-Thérèse débarquait à Paris et triomphait. Désormais, et c’est lui que le dit, Joseph Gorgoni, a l’âge du rôle. Marie-Thérèse et son tailleur rose, sa permanente inamovible, sa voix perchée, aux répliques acides et assassines n’a rien perdu de son mordant, de sa méchanceté, de sa rage et de sa mauvaise foi. Qu’elle chante (et quelle voix !), danse (ah ce jeté de jambes unique…), pratique les claquettes (en pataugas s’il vous plaît), c’est un véritable show, une performance hilarante et époustouflante. Répliques qui font mouche, jeux de mots et langue qui fourche, c’est formidablement écrit, ne cédant jamais, ou presque et si peu, à la facilité… C’est parfois, comme par mégarde, égrillard mais jamais vulgaire. Rien de souligné, d’appuyé grassement mais une justesse, dans l’écriture et le jeu qui vous embarquent fissa et vous démantibulent les mandibules. Joseph Gorgoni n’est pas plus travesti que vous est moi, il est Marie-Thérèse Porchet jusque dans ses excès, laquelle semble l’avoir avalé tout cru. C’est tout le sel et le poivre de cette création qui n’a pas pris une ride. Tout ça est d’une efficacité redoutable. C’est d’une énergie folle, un tempo qui va crescendo et sans jamais faiblir au rythme de la descente tout schuss en enfer de Marie-Thérèse Porchet. C’est avec le même fou rire irrépressible que l’on revoit les scènes cultes, Marie-Thérèse à la messe, Marie-Thérèse découvrant le pot au rose, Marie-Thérèse en boîte (La banquise !)… Il y a vingt ans la Manif pour Tous n’était pas sortie du bois, Marie-Thérèse Porchet, née Bertholet, avait pris de l’avance. Ce personnage d’une bêtise insondable affichait déjà ce qui se chuchotait tout bas, cette homophobie rampante et de bon ton, soucieuse de sa réputation. Sous la perruque le regard est impitoyable et marque à la culotte cette bonne conscience qui n’est en rien bonne, ni consciente, ni propre à la Suisse mais bien universelle dans son intolérance. La différence avec ces gens-là tient à la conclusion, un retournement spectaculaire, un véritable hymne à la tolérance, qui fait accéder haut la main au panthéon de l’humour camp, vachard comme il se doit, Marie Thérèse Porchet, née Bertholet. Ainsi soit-elle.

© Pascal Bernheim

Marie Thérèse Porchet, la truie est en moi ! Texte et mise en scène Joseph Gorgoni et Pierre Naftule

Jusqu’au 22 septembre 2019

Du mercredi au samedi à 21h, le dimanche à 16h

Théâtre de la Gaîté-Montparnasse

26, rue de la Gaîté

75014 Paris

Réservations 01 43 20 60 56

Gaite.billeterie@orange.fr

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