Article de Bernardo Trabal

© Christophe Raynaud de Lage

Le fils d’une famille fantasme sur la nouvelle compagne de son père qui vient de s’installer chez eux. Celle-ci ne sent pas à sa place. Le père ne comprend pas, et se voit découvrir en lui une jalousie grandissante. Personne ne se parle, la communication et la capacité à exprimer ses désirs les plus intimes sont impossibles.

Et en effet, au plateau, personne ne se parle… Les comédiens ne jouent pas ensemble, n’ont pas d’écoute, et aucun sens du rythme, faisant de leur présence scénique un artifice sans vie. Ils n’ont ni le désir profond ou l’urgence de venir prendre la parole ou défendre un propos. Mais nous les comprenons, les plaignons et les pardonnons car, pour parler de propos, il n’y en a aucun. Ce spectacle est littéralement d’une vacuité intellectuelle indécente. Le texte de Frédéric Voissier est plat, vide et d’une misogynie insoutenable. La mise en scène n’arrive pas à rattraper le coup, car nous avons comme l’impression qu’elle surfe sur les clichés du théâtre contemporain, faisant de son geste scénique une esthétique grossière. Malgré la lumière ingénieuse et très travaillée dans ce spectacle, l’usage de la vidéo, plutôt que de mettre en valeur les tensions dramatiques, absorbe malheureusement toute possibilité d’évènement.

Il s’agit en fait d’une proposition convenue, qui ne prend aucun risque, qui n’a ni parti pris et ni radicalité. Cette forme n’interroge en aucun cas le monde qui nous entoure, au moment où la souffrance se fait entendre, et où nous avons besoin du théâtre pour nous rassembler, prendre collectivement conscience de certaines vérités, et se positionner face au réel. A dire vrai, on ne comprend pas où ils veulent en venir, car rien n’est limpide moralement dans cette histoire et, au-delà des maladresses scéniques qui seraient à retravailler, il n’y aucun intérêt à monter ce texte.

Comment ce spectacle s’est-il retrouvé à gagner le Festival Impatience, dont la politique va tout contre le projet de ce spectacle qui n’a ni jeunesse ni audace ? Cela reste un mystère. Mais si il reflète, par le choix du jury qui prône un théâtre émergent, l’image de la jeune création dans le paysage théâtral contemporain français, leur décision est lâche et elle-même sans prise de risque. Car en effet, la création de « la jeunesse impatiente » est généralement bien plus belle et novatrice, bien plus engagée et militante, bien plus chargée de vie et d’espoir pour la scène de demain face au lauréat de 2016.

Lotissement
Texte de Frédéric Vossier
Mise en scène, scénographie et lumière Tommy Milliot
Dramaturgie et voix Sarah Cillaire
Vidéo Vlad Chirita
Régie générale James Groguelin
Régie son Gaëlle Hispard, Simon Poupard
Régie vidéo Gaëlle Hispard
Avec Eye Haidara, Miglen Mirtchev, Isaïe Sultan

Du 22 au 24 juillet

Gymnase du Lycée Saint-Joseph
Rue des teinturiers 84000 Avignon
Réservation au 04 90 14 14 14
www.festival-avignon.com

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