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ƒƒƒ Article de Corinne François-Denève

Après Le Paquebot Tenacity, l’équipe de Big Cat Company poursuit son exploration des classiques oubliés des années trente et quarante. Pierre Boucard et Barbara Castin sont ainsi allés exhumer une pièce d’Armand Salacrou, jouée pour la première fois en 1946, Les Nuits de la colère.

Créée aux lendemains de la Libération, la pièce refuse le « théâtre d’évasion » et veut « s’attaquer aux grands problèmes de notre temps », selon les principes mis en avant par Salacrou lui-même. Les Nuits de la colère met ainsi en scène des résistants et des crapules, questionnant l’héroïsme des uns et la lâcheté des autres, dans un rare procédé de flash-back. Dans l’armée des ombres, un homme a été trahi. Par qui ? Pourquoi ? Par lâcheté ? Par idéalisme faussé ? Les meilleures intentions du monde entraînent-elles le plus grand des crimes ? A l’époque, le propos avait attiré la colère de Sartre, qui reprochait perfidement à Salacrou de ne pas suffisamment avoir fréquenté les libérateurs de la France.

Très ancré dans le contexte de l’après-guerre, Les Nuits de la colère, on le voit, n’en brasse pas moins des thèmes intemporels. Entre Le Repas des fauves et Marie-Octobre, la pièce déroule une intrigue policière, se présentant comme un haletant « whodunnit ». Deux couples se rapprochent, avant-guerre, qui dansent ensemble le « Lambeth Walk », avant de danser, la guerre venue, sur des cendres. Sur scène, on verra un attentat, une poursuite, une arrestation, des tortures – le tout, avec la pudeur attendue d’un théâtre classiquement pur, et une précision évocatoire digne d’un film d’action. La scénographie est minimale – un dessin au crayon sur un fond blanc ; les acteurs de la troupe assistent côté cour et jardin à ce qui se joue sur scène : la mise en scène du procès d’une France divisée.

Sur le plateau, les monologues réflexifs succèdent aux scènes d’action, le tout astucieusement accompagné par les transitions de sons et de lumières. L’interprétation est jeune et fiévreuse, passionnée et nuancée, donnant des couleurs subtiles à ce drame de l’humanité ordinaire, confrontée à des évènements qui la dépassent. Nul doute que la pièce, par son sujet, sa qualité, trouvera le succès à Avignon et, on l’espère, ailleurs, à la rentrée.

Les Nuits de la colère d’Armand Salacrou

Mise en scène  Pierre Boucard

Avec  J-B. Artigas, P. Boucard, B. Castin, S. Giuranna, J. Godgrand, S. Mossot, C. Pourchet

Décors  Michel Féaudière

Costumes  Caroline Gichuki

Lumières  Denis Koransky

Son  Maxime Richelme

The big cat company et DSCP

Diffusion  Fabienne Rieser

Du 5 au 29 juillet 2018 à 14 h 10
Relâches les 10, 17 et 24 juillet

Durée  1 h 20

Théâtre du Roi René

4 bis, rue Grivolas

84000 Avignon

Réservations : +33 (0)4 90 82 24 35  ou +33 (0)7 81 41 24 96

https://theatreduroirene.com

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