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Les Inconsolés, d’Alain Buffard, au Centre Pompidou (avec le Centre National de la Danse)

Oct 16, 2017 | Commentaires fermés sur Les Inconsolés, d’Alain Buffard, au Centre Pompidou (avec le Centre National de la Danse)

© Marc Domage

ƒƒƒ article de Denis Sanglard

Ça commence dans l’obscurité par le Roi des Aulnes de Goethe, récité en allemand. Et du noir, des pendrillons, surgissent des fragments de corps. Ici un bras, là des pieds. Une tête. Masquée. Ils seront masqués, indifférenciés et interchangeables, ces trois sur le plateau qui bientôt exposeront les éclats sombres d’une vie intime. Enfants, adultes, on ne sait, les jeux perdent très vite de leur innocence, le si magique de l’enfance, l’innocence, bascule dans la réalité la plus trouble, la plus violente. Aux caresses, à la sensualité succèdent les coups et la cravache. Violence, viol, sexe, inceste, pédophilie… dog-training, sneaking. Alain Buffard crûment, sans tabou, explore le désir, la sexualité la plus extrême. Joue sur les frontières entre le licite et l’illicite. Traverse le miroir de nos pulsions secrètes qu’il met en pratique, à nu. Exacerbe ce point où tout bascule entre « le premier trouble et l’imagerie récurrente de sa reconstitution ». Séduction, relation de domination, de soumission, relations sadomasochistes imposée puis consenties où dominants et dominés échangent leur rôle. Ou le dominant n’est jamais celui que l’on croit. C’est toute la complexité des rapports sexuels, bientôt amoureux, des rapports humains, homosexuels, poussés à leur incandescence et dans leurs retranchements ultimes. Au jardin du plateau, un théâtre d’ombre, castelet homo érotique qui se joue des perspectives, silhouettes étirées ou massives, écrasantes, corps avalés, foulés au pied, corps emmêlés, embrassés, caressés, pénétrés, rejetés. Corps inconsolables, inconsolés. La petite mort rejoint bientôt la grande. Annonce de la dernière image qui signe la mise à mort des amants, siffle la fin du jeu. Pièce troublante, crue, violente, dure, juste, terriblement, magnifiquement juste. Alain Buffard, mort en 2013, signait en 2005 une chorégraphie des corps affamés, libres et libres d’accepter la contrainte, délivrés de tout tabou, sans moralité. Des corps affranchis. Une chorégraphie sans concession, une prise de position tranchante, nette, ne s’embarrassant pas de métaphores, de fausse pudeur. Alain Buffard renversait les perspectives, proposait une vision débarrassée des anathèmes. Plus de dix ans après elle n’a rien perdu de sa force et de sa pertinence. De sa beauté brute et vénéneuse. Alain Buffard n’est plus, nous demeurons inconsolés.

 

Les Inconsolés, conception Alain Buffard

Fabrication Alain Buffard, Mathieu Doze, Christophe Ives
Assistés par Claire Servant et Christophe Wavelet
REconstruction en 2017  Mathieu Doze, Christophe Ives
Accompagnement artistique Fanny de Chaillé
Interprétation Bryan Campbell, Mark Lorimer, Miguel Pereira
Affineuse Enora Rivière
Accompagnement technique  Christophe Poux
Régie plateau et GIB Jérémie Sananes
Lumières Paul Beaureilles, Thalie Lurault
Régie lumières Ludovic Rivière
Son Frédéric Marolleau
Masques Daniel Cendron

Du 12 au 14 octobre 2017 à 20h30

Centre Georges Pompidou
Grande salle niveau -1
75004 Paris

Réservations 01 44 78 12 33

www.centrepompidou.fr/billeterie

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