Critiques // « Les Chevaliers » de l’association Nöjd à la Maison des Métallos

« Les Chevaliers » de l’association Nöjd à la Maison des Métallos

Avr 12, 2011 | Aucun commentaire sur « Les Chevaliers » de l’association Nöjd à la Maison des Métallos

Crituque d’Ottavia Locchi

Tagada, tagada, voilà les chevaliers, débarqués, vous vous en doutez, pour faire triompher le droit et la dignité !

Sur les planches de la Maison des Métallos, quatre hurluberlus s’exaltent au son des jeux de mots et éructent leur rage contre les manants. Ils aiment converser, se battre, pousser des cris de guerre, ripailler et chanter, le tout sur fond de mission suprême.

Rahhh !

Voici mesdames et messieurs un spectacle hors du commun, habité par des esprits vaillants et vigoureux qui n’ont rien à dire ni à se dire, et qui trouvent tout et n’importe quoi pour meubler leur train de vie de chevalier valeureux !

Dans ce spectacle, pas de début, pas de fin, mais en attendant ils grognent, meurent, boivent, chantent, se battent et prient. Dans l’univers des « Chevaliers », Dieu est une asiatique toute fine au cerveau surdéveloppé portant un bonnet mauve qui aime les pauses culturelles et se pose des questions existentielles au point d’en être soporifique. Dans cet univers, un comédien entre en scène juste pour y mourir.

Nom d’un glaive, j’ai eu peur.

Si le principe de leur mission reste vague, le public n’est pas en reste quand aux fous-rires. Le ton tellement décalé de cette pièce permet un humour décapant et prodigieusement pertinent. Tout ceci n’est rien d’autre qu’un pathétique reflet d’une masculinité exacerbée. Qu’il est bon de regarder les chevaliers s’entretuer pour tuer le temps ! Avec des principes disparus depuis des siècles et des mots de vocabulaire fort bien agrémentés, les quatre chevaliers consanguins en costard cravate se rêvent, et rêvent d’un monde à conquérir. Une sorte de Monty Python à la française, loin de tomber dans le pastiche trop attendu et entendu de la mission du Graal ! Ils savent rester déconcertants du début à la fin. Là où nait un semblant d’histoire ou d’intrigue, peu importe ! Leur mission reste celle de mener à bout la Mission, qui peut-être n’existe que dans leur imagination…

Chaque personnage apporte son lot d’absurdité. Les quatre chevaliers jouent les machos moyenâgeux, l’“intervention divine” n’a plus grand chose de divin et la sensation d’avoir des comédiens qui ne servent à rien a ceci d’extraordinaire que cela sort de l’ordinaire.

Un espace optimisé !

La Maison des Métallos a-t-elle déjà été aussi exploitée ? Dès l’entrée, deux gugusses nous accueillent avec un discours quelque peu déstabilisant – dont je ne veux dévoiler les finesses ici -, qui a pour but de nous rassurer « Vous n’êtes pas des repus ! » tout en nous affolant un petit peu, quand même… Et à l’intérieur de la salle, des portes claquent, du feu apparaît, ils font le tour de la scène, des personnages surgissent et disparaissent, ils envoient un poulet dans le fond du public (si, si!)… Que d’actions ! Voilà enfin un spectacle qui ne se contente pas que de son espace scénique !

Héroïsme et impuissance

« On pourrait dire que c’est du théâtre absurdo comique involontairement engagé ou plutôt une farce politique malencontreusement divertissante. » Cette phrase de l’auteur et metteur en scène Guillaume Bailliart qualifie parfaitement ce spectacle haut en couleur et en surprises. Il est très intéressant de voir l’Homme (et la Femme!) s’imaginant en sorte de viking indispensable au bon fonctionnement du monde, alors qu’ils ne sont que des héros de pacotilles dont le monde se fout éperdument.

Ce ballottement perpétuel entre héroïsme et impuissance tend à nous faire rire et réfléchir : une qualité appréciée depuis la création du spectacle en 2007, que l’on retrouve hélas trop peu dans les pièces dites “comiques” !

Les Chevaliers
Texte et mise en scène : Guillaume Bailliart
Assistanat : Aurélie Pitrat
Avec : Guillaume Bailliart, Mélanie Bestel, Mélanie Bourgeois, Pierre Jean Etienne, Laurent Dratler, Thierry Otin, Aurelie Pitrat et Gerard Robert-Tissot
Travail physique : Kylie Walters
Lumière et régies : Jérôme Perez
Toile : Sacha Barbieri
Diapos : Jérémie Lamouroux
Costumes : Cathy Ray
Mannequins : Cara Marsol
Composition musicale : Laurent François

Du 5 au 10 avril 2011

Maison des Metallos
94 rue Jean-Pierre Timbaud, 75 011 Paris – Réservations01 47 00 25 20
www.maisondesmetallos.org

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