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Les 7 nuits de la Reine, de Christiane Singer, adaptation d’Evelyne Pelletier, mise en scène de Philippe Lanton, Théâtre de l’Epée de Bois

Nov 28, 2022 | Commentaires fermés sur Les 7 nuits de la Reine, de Christiane Singer, adaptation d’Evelyne Pelletier, mise en scène de Philippe Lanton, Théâtre de l’Epée de Bois

ƒƒ Article de Sylvie Boursier

La Genèse mentionne six jours pour la création du monde et un septième dédié au repos, l’homme du huitième jour dépasse le stade animal et psychique, pour arriver à la spiritualité.

Christiane Singer, reine de la nuit, situe sa Genèse personnelle dans le monde nocturne et s’ouvre avec lui aux multiples réminiscences des plis de la mémoire, « La nuit ouvre les vannes du temps [...] me laisse sans âge et sans carte routière. D’elle à moi, pas de limite », comme un écho à Michaël Foessel « On consent à la nuit parce qu’elle est dénuée de témoins à charge. » En sept nuits elle nous livre sa vie reconstituée, son moi rassemblé. Evelyne Pelletier est sa voix, son souffle pourrait-on dire, une présence fraternelle, naturelle, on a presque envie de la serrer dans nos bras comme une amie. Sans apprêt, sans artifice superfétatoire, elle nous conte ce que nous savons, la cérémonie des adieux, les choses dites dont nous ignorions que ce serait les dernières, la passion amoureuse, la sidération, les heures bleues ou blanches quand le silence est troué par les rêves.

Philippe Lanton met en espace pizzicato ces confidences, il joue sur le velours du son, les clairs obscurs et les voix off pour garder intacte la légèreté de la comédienne qui glisse sur le parquet.

Une heure de théâtre littéraire, intime, dans l’écrin de l’Epée de Bois, notre mémoire encombrée en sort libérée avec l’envie « d’être ténébreux » comme le suggérait Diderot, de perdre le contrôle. « Vous savez comme les gens sont beaux la nuit », fait dire Jean Eustache à Jean-Pierre Léaud dans La Maman et la Putain, c’est exactement ce que l’on ressent en voyant Evelyne Pelletier sur la boîte noire du plateau, sa respiration ouvre à tous les possibles comme une promesse de l’aube aux doigts de rose, la vérité se fait nuit, évidemment !