Critiques // Lecture • « Lettres d’amour à une princesse chinoise, et autres pièces courtes » de Mateï Visniec. Actes Sud Papiers

Lecture • « Lettres d’amour à une princesse chinoise, et autres pièces courtes » de Mateï Visniec. Actes Sud Papiers

Déc 17, 2012 | Aucun commentaire sur Lecture • « Lettres d’amour à une princesse chinoise, et autres pièces courtes » de Mateï Visniec. Actes Sud Papiers

ƒƒ Lecture de Rachelle Dhéry

 

Connu pour « Petit boulot pour vieux clown », « L’histoire du communisme raconté aux malades mentaux », « Richard III n’aura pas lieu » ou encore « L’histoire des Ours Pandas racontée par un saxophoniste qui a une petite amie à Francfort », Mateï Visniec, un des auteurs les plus joués en France, nous entraîne à nouveau dans son univers aux personnages incongrus et atypiques. Dramaturge, poète et journaliste, né en 1956 en Roumanie, il a reçu en 2009 le prix européen de la SACD.

Entre longs poèmes et monologues, les pièces courtes de Visniec résonnent comme un cri d’amour dans la nuit. Pas l’amour physique, charnel, mais bien celui que l’on a envie de dire, avant de faire. Dès la première pièce courte qui donne son nom au livre, où deux maisons florales de l’Empire de Chine se battent à coup de lettres le droit d’organiser le mariage de la princesse, ou bien celle où un voyageur dans la pluie, sur le point de mourir, se retrouve sur le quai d’une gare sans train, celle où une enfant bavarde se prend d’affection pour un étrange sculpteur de rochers sauvages, celle où un vendeur de chaussures est si bon qu’il peut vous attirer dans sa chambre, celle où évoluent de drôles de révolutionnaires embarqués dans une baignoire, et on termine autour d’un repas avec la mort. Direct, frontal et mordant.

« Toute la vie nous attendons la mort et toute la mort nous attendons la vie »

A la fois follement poétique et romantique quand un homme déclare son amour à Madame, c’est surtout un goût étrange d’aventures que j’ai ressenti en lisant ces pièces courtes. Peut-être parce que ces personnages tout droit sortis de son imaginaire débordant ne ressemblent à rien de connu. Il parvient à embarquer le lecteur sur des rivages étonnants, étranges et excentriques. Et au moment où on s’y attend le moins, il nous rattrape au détour d’une phrase pour nous rappeler à quel point nous nous étions fourvoyés. Parce qu’il y a beaucoup de nous, dans chacune de ses pièces. Même quand il fait l’apologie de l’artiste, à travers son sculpteur, il le fait avec tact et subtilité.

« Voilà… Tout est prêt…Dans cinq minutes elle sera là. (…) Et pendant qu’elle s’assoit, je vais sortir doucement mon cœur de ma poitrine et je vais le mettre sur la table. Mon cœur palpitant sur la nappe blanche. Comme un petit cadeau. »

Hormis quelques longueurs (certainement dues à sa passion indéniable de notre belle langue), ces nouvelles pièces courtes de Visniec auront sans doute encore plus de charme, une fois portées à la scène. Gardons l’œil bien ouvert.

Lettres d’amour à une princesse chinoise, et autres pièces courtes de Mateï Visniec
Actes Sud Papiers -– septembre 2012 – 96 pages – 13 euros
www.actes-sud.fr

 

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