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Lecture ・ « Demain matin, neuf heures » de René Pillot, Librairie Théâtrale

Jan 20, 2014 | Aucun commentaire sur Lecture ・ « Demain matin, neuf heures » de René Pillot, Librairie Théâtrale

Article Bruno Deslot

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L’arbre qui cache la forêt

Noémie et Edouard, accompagnés d’un portier parcourent la campagne au rythme de répliques piquantes, tissant la toile d’une vie passée, en apparence, sans grand intérêt.

Les deux personnages principaux, Noémie et Edouard, se révèlent être d’un autre temps, du siècle dernier, ou d’un autre. Difficile d’inscrire ces deux personnalités si singulières dans une temporalité proche ou loin de nous. Leur échange verbal se veut suranné et des suites de mots souvent pesantes pour le lecteur et inutiles pour la scène.

Les deux personnages principaux ont une réelle complicité et l’on comprend très vite que les relations de ce vieux couple, à bout de souffle, se délitent tout au long de la pièce. Pour Noémie et Edouard, tout est prétexte à se souvenir du passé mais de manière si évidente que tout semble être dit d’avance. Aucun effet de surprise, tout devient très ou trop, rapidement prévisible. La balade « En campagne » tente d’esquisser un paysage sensoriel et visuel qui ne fonctionne pas. Les répliques sont trop descriptives et on lit la pièce de René Pillot davantage comme un roman que comme un texte de théâtre. Le dialogue trop narratif, épuise l’action, moteur essentiel d’une pièce de théâtre. Le lecteur pourra trouver du plaisir à découvrir une langue maîtrisée et volontairement empruntée en parcourant ce registre de souvenirs souvent aigres et plein de rancœurs.

Du « parc » à « la campagne », les personnages évoluent dans une ambiance très bucolique, propice aux souvenirs. On perçoit les traits d’un mauvais Watteau et l’on ressent le goût d’une boite de chocolat bon marché tout au long de la pièce. Édouard, ancien militaire au passé moins lisse que les plis de son uniforme s’oppose à Noémie, une femme rêveuse évoquant la mort, l’absence, l’indifférence sans détours. L’auteur file la métaphore d’un bout à l’autre de la pièce entre la nature et la vie passée des deux personnages. Une belle littérature habilement menée par une plume inventive. Mais au-delà du sujet singulier que traite l’auteur, la pièce ne semble pas avoir trouvé son écriture. La langue vise une poésie faite de lyrisme un peu trop artificielle et volontariste. Sans doute faudrait-il que les enjeux et l’action soient plus clairs et que la langue se simplifie au profit du théâtre. La lecture de l’ouvrage de René Pillot laisse l’impression d’un projet qui ne s’est pas véritablement trouvé. Tout reste à distance au détriment de la force du jeu et des situations.

Ce ressenti n’est aucunement arbitraire et cette balade champêtre ne doit pas décourager les amateurs de propositions de ce genre.

Demain matin, neuf heures
De René Pillot
Librairie Théâtrale
3 rue de Marivaux
75002 Paris

 

www.librairie-theatrale.com

 

 

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