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Lecture. «  S’engager ? » Vinaver-Camus Correspondances (1946-1957)

Juil 06, 2012 | Aucun commentaire sur Lecture. «  S’engager ? » Vinaver-Camus Correspondances (1946-1957)

Lecture Dashiell Donello

Rien plutôt que l’assassinat


Impressionné, par la lecture de « L’étranger » d’Albert Camus (1913-1960), l’étudiant Michel Vinaver, d’origine juive, âgé de 19 ans, et émigré à New York depuis 1941, assiste à la conférence que donnait l’écrivain en 1946, à Wesleyan University, ce qui lui apportera par la suite une prospérité planétaire. Vinaver osera aller le voir à la fin de son speech pour avoir un rendez-vous ce que Camus lui accordera dans cette même année. Entre 1946 et 1957 les rencontres et démarches épistolaires vont s’enchaîner jusqu’à un échange de point de vue sur l’écriture et l’engagement, qui peu à peu va déboucher sur une relation d’amitié.

Ce livre a pour introduction une note liminaire de Simon Chemama qui nous apprend avec joyeuseté, ce qui avait vraiment établi le contact avec nos deux écrivains à cette époque. Vinaver lui disait qu’il  préparait un mémoire sur l’humour dans La Colonie pénitentiaire de Kafka et L’Étranger.

Vient ensuite la correspondance entre Camus et Vinaver de 1946 à 1957. Trente six lettres où va se creuser entre eux une question d’importance sur l’engagement. Dans une lettre d’août 1946 Vinaver pu lire ceci : « (…) ce que vous me dites de votre génération n’est pas neuf pour moi. Mais il y a un progrès sur la mienne. À votre âge, et à mon époque, on disait Tout et même l’assassinat plutôt que d’être rien. Le vôtre dit Rien plutôt que l’assassinat. Ce n’est pas si mal. »

Une autre partie du livre, « notes sur les lettres » par Simon Chemama étudie la connexion et la place de l’écrivain et de l’écriture dans la société. L’ouvrage se termine par des documents (1945-1949) où entre autres on peut lire le premier entretien entre Michel Vinaver et Albert Camus. Pour avoir une petite idée du ton de cette conversation voici quelques petites phrases : « (…) si on a vraiment quelque chose dans le ventre, on finit toujours par le sortir. (…) Il est très dur d’abandonner une ambition. (…) Je demande : « Pourquoi vous êtes-vous fait lecteur des jeunes de moins de 23 ans s’ils ne font rien de bien ? »-«  Parce qu’on y décèle des promesses ».

Ce livre existerait-il aujourd’hui ? C’était au temps heureux où la courtoisie culturelle avait encore de la classe. Un jeune auteur pouvait solliciter un grand écrivain et le rencontrer sans passer par la case méprisante et silencieuse des barrages élaborés par la notoriété et une hiérarchie qui somme toute ne veut rien dire chez les écrivains tels que Camus et Vinaver. Oui, S’engager ? Parle d’un temps qui peut encore renaître, si on sait déceler les promesses.

S’engager ?
Albert Camus – Michel Vinaver
Correspondance (1946-1957)
Assortie d’autres documents

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