Critiques // « Le Temps qui Passe » de Karine Silla-Perez aux Mathurins

« Le Temps qui Passe » de Karine Silla-Perez aux Mathurins

Avr 04, 2011 | Aucun commentaire sur « Le Temps qui Passe » de Karine Silla-Perez aux Mathurins

Critique de Bettina Jacquemin

Au delà du cheminement…

La Pièce de Karine Silla-Perez, « Le temps qui passe » réunit Elsa Zylberstein et Vincent Perez sur la scène du Théâtre des Mathurins. Au-delà d’une rencontre entre deux solitudes, on découvre un auteur dont le texte explore l’intime et le rapport à l’absence. Un Face à face subtil et une quête universelle sur l’identité.

Une jeune femme est à la recherche de son père, parti lorsqu’elle avait quatre ans. Quelques informations glanées lors d’une soirée la guide chez un homme qui recherche les disparus. Le spécialiste de l’abandon la conduit peu à peu à mieux savoir où elle va. Une quête sur l’identité qui le mène, lui aussi à déposer les armes.

Le souffle coupé

Elsa Zylberstein entre en scène, la respiration saccadée et les pas hésitants. Une allusion délicate à son personnage. La comédienne interprète Marie, une jeune femme à la recherche de ses origines, à l’étroit dans une vie où il est désormais bien difficile d’avancer. Pas évident de savoir qui l’on est quand on ne sait pas d’où l’on vient. Marie étouffe, elle pousse alors la porte d’un spécialiste des affaires familiales.

Vincent Perez interprète celui qu’elle surprend d’abord dans son intimité. Quelques pas de danse (gracieusement effectués par le comédien) suffisent pour comprendre que ce médecin de l’âme a rêvé, un jour d’être danseur… La jeune femme se confie, dévoilant une peur réelle de la mort et la détestable sensation qu’elle éprouve quand les choses se terminent, « tout arrive de manière sournoise et fulgurante… », dit-elle. Comment ne pas s’imaginer le pire quand les gens ont quelques minutes de retard ? Comment confier ses secrets sans prendre en otage ceux que l’on aime ?

Mise à nu

Un rendez-vous puis deux puis trois, les questions s’enchaînent et l’intime se dévoile. Un mot suffit pour que les protagonistes se racontent. Dans un jeu de ping-pong, finement orchestré par l’auteur, les mots résonnent les uns aux autres, Marie ôte la carapace qu’elle s’est forgée. La colère s’estompe. Et, celui qui, paralysé par le trac avoue avoir abandonné une carrière de danseur, capitule devant celle qui voulait juste savoir qu’elle était « la fille de quelqu’un ».

Loin d’assister à une psychanalyse, on savoure la juste confidence mise en scène par le comédien, lui-même. Une mise à nu que Vincent Perez choisit de proposer dans un décor épuré. Il privilégie les jeux de lumière et souligne ainsi à l’aide de quelques pas de danse, l’angoisse de l’un et le besoin d’amour de l’autre.

Résonance

Elsa Zylberstein et Vincent Perez ne sont pas les simples passeurs d’une histoire. Malgré un léger essoufflement (le comédien n’est pas monté sur scène depuis vingt ans) et un texte dense, Karine Silla-Perez semble avoir voulu tout dire laissant trop peu de place à notre imagination, les deux comédiens nous happent pour mieux nous impliquer.

Une relation subtile s’établit entre les deux personnages. L’un, le bagage lourd et le cœur chargé cherche à comprendre comment un absent peut déterminer une vie. L’autre, charmé abandonne peu à peu la distance qu’il avait instaurée. D’où vient ce besoin de chercher l’absent ? Qu’est ce que grandir, avancer et construire ? Comment la passion désarme ? Pour y répondre, les comédiens nous embarquent avec anxiété, fébrilité, confidences, passion et humour. Un cheminement alors bien moins personnel qu’il n’y paraît…

Le temps qui passe
De : Karine Silla-Perez
Mise en scène : Vincent Perez
Avec : Elsa Zylberstein et Vincent Perez

Du 10 mars au 30 avril 2011

Théâtre des Mathurins
36 rue des Mathurins, 75 008 Paris – Réservations 01 42 65 90 00
www.theatredesmathurins.com

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