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« Le philosophe et la putain », de Jacques Rampal, mise en scène Elsa Royer

Août 31, 2015 | Commentaires fermés sur « Le philosophe et la putain », de Jacques Rampal, mise en scène Elsa Royer

article de Florent Mirandole

indexCroquis scénographie par Danièle Rozier

Une immense amphore trône sur la scène. Venu visiter son ancien élève Diogène, Antisthène s’avance prudemment devant l’entrée recouverte d’un petit rideau. Il est vite repoussé par les faux aboiements émanant de l’amphore. Platon, en toge, contemple la scène en arborant un sourire goguenard. La scène se veut drôle.

Cette scène d’ouverture du « philosophe et la putain » donne le ton de la pièce écrite par Jacques Rampal. L’auteur de « Célimène et le cardinal » s’est emparé de la vie du philosophe grec pour en faire un résumé concentré sur deux périodes de sa vie. Aucun détail sur la vie du philosophe n’est épargné au spectateur, de sa vie dans une amphore à sa rencontre avec Alexandre de Macédoine, sans que l’on distingue à aucun moment ce qui a intéressé l’écrivain.

A-t-il été attiré par le Diogène politique, un « indigné » en révolte face « aux injustices toujours grandissantes » ? Ou est-ce cette philosophie cynique prônant un détachement du monde matériel qui a plu à l’écrivain ? A moins encore que ce soit les ambiguïtés du personnage, pudibond devant les démonstrations scabreuses Cratès et Hipparchia, mais prêt à se donner du plaisir en place publique.

Jacques Rampal ne nous laisse jamais le temps de suivre une piste, puisqu’il en ouvre une nouvelle à chaque scène. Au terme d’une grosse heure et demi de spectacle, on ressort ainsi rassasié en anecdotes philosophiques, sans avoir gouté le sel de la philosophie de Diogène. L’écrivain semble s’être arrêté au milieu de ses recherches, se contentant de raconter les excès d’un personnage pour lequel il nourrit manifestement une grande affection. Il en ressort ainsi un spectacle très documenté, mais qui finit par tanguer faute d’ancrage.

Un semblant de cohérence est donné avec le ton exubérant et volontairement outré, proche de la commedia dell’arte. Diogène, interprété par Alain Leclerc, ou Cratès et Hipparchia, interprétés par Christian Pélissier et Françoise Pinkwasser, s’amusent ainsi à exhiber leur inhibition dans des danses dionysiaques, souvent d’un mauvais gout assumé. Mais les démonstrations outrancières finissent par mettre mal à l’aise alors que l’on ne saisit toujours pas l’enjeu de la pièce.

Seul le personnage d’Hariola reste solide devant ces incessants changements de caps. Eternelle amoureuse mais constamment repoussée par l’irascible philosophe, le personnage interprété par Anne Jacquemin finit par émouvoir par sa constance. L’actrice construit un personnage complexe, variant entre les déclarations d’amour passionnées et les menaces désespérées à l’encontre du philosophe. Mais sa présence et ses quelques anachronismes amusants ne permettent pas à eux seuls à sauver la pièce.

Alors que Diogène « cherche l’homme », le spectateur sort de cette pièce en cherchant toujours son sens.

« Le philosophe et la putain »
Texte Jacques Rampal
Mise en scène Elsa Royer
Musique Fabien Colella
Scénographie et costumes Danièle Rozier,
Création lumières Antonio De Carvalho
Avec François Chodat Antisthène, Pierre-Yves Desmonceaux Platon, Anne Jacquemin (Hariola), Alain Leclerc Diogène, Christian Pélissier Cratès, Françoise Pinkwasser Hipparchia, Yann Sundberg Alexandre

Du 27 aout au 4 octobre 2015

Théâtre 13 / Seine
30, rue du Chevaleret – 75013 Paris
M° Bibliothèque François Mitterrand
Réservation 01 45 88 62 22
www.theatre13.com

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