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Le Livre de ma Mère, d’Albert Cohen, mise en scène de Dominique Pitoiset, au Théâtre des Célestins

Fév 01, 2019 | Commentaires fermés sur Le Livre de ma Mère, d’Albert Cohen, mise en scène de Dominique Pitoiset, au Théâtre des Célestins

ƒ article de Victoria Fourel

Mères de toute la terre, écoutez ces paroles. Entendez que vous êtes la force de tout homme, l’île de toute homme. Que vous êtes immortelles, que l’on passe notre vie à regarder vers vous. Patrick Timsit décide de dire Le Livre de ma mère, dans un seul en scène qu’il porte en lui depuis longtemps.

C’est avec sincérité que l’acteur prend le plateau. En regard direct avec son public, il sait se faire touchant, et on sent sans mal l’amour qu’il a pour le texte d’Albert Cohen, et pour cette mère, la mère de roman et la mère de vraie vie. Il joue avec un public déjà conquis, et il ne se dérobe pas devant les plus beaux passages de l’œuvre. N’oubliez pas que vos mères sont mortelles, nous dit-il, ému.

Ce spectacle fait partie des spectacles de cœur, ceux que les comédiens portent en eux, avec le désir de l’offrir au public. Le genre qui du coup, ne devient jamais vraiment un objet de scène, mais davantage une conversation avec un grand acteur populaire qui nous parle. La mise en scène fait le choix de mettre Patrick Timsit dans un costume chic, derrière un grand bureau et un ordinateur, armé de feuilles et de crayons. L’auteur. Le grand bureau est moderne et foisonnant, et on regrette qu’il ne soit pas plus mis en jeu et mis en scène. L’acteur prend toujours appui sur ses feuilles, et chausse et déchausse ses lunettes pour accentuer le côté « en travail » de sa prestation.

L’objectif de ce choix est peut-être d’atténuer encore un peu plus la barrière entre l’acteur qui se dévoile et son public, en nous faisant pénétrer son espace de création. On le comprend, mais le tout est un peu premier degré, et en permanence à la lisière entre rôle de fiction et performance d’acteur sans mise en scène, face au texte. De la même façon, un écran géant permet de projeter des vidéos. Ces passages vidéos ne sont pas tous aussi intéressants ni tous aussi beaux. Même chose pour la musique, qui apparaît et disparaît sans vraiment nous embarquer.

Il y a un décalage entre un réel désir de mise en scène et un besoin de texte nu dans ce spectacle. Cela se voit aussi dans l’interprétation de Patrick Timsit, qui truque beaucoup sa voix, et abuse parfois du ton lyrique et profond. Dommage, car lorsqu’il joue la simplicité et la tendresse, il tombe toujours juste. C’est donc un spectacle à l’équilibre incertain, valant davantage pour la rencontre avec un acteur que pour son travail de re-création.