À l'affiche, Critiques // Le jeu de l’amour et du hasard de Marivaux, mise en scène de Benoît Lambert, Théâtre de l’Aquarium

Le jeu de l’amour et du hasard de Marivaux, mise en scène de Benoît Lambert, Théâtre de l’Aquarium

Oct 09, 2018 | Commentaires fermés sur Le jeu de l’amour et du hasard de Marivaux, mise en scène de Benoît Lambert, Théâtre de l’Aquarium

 

© Vincent Arbelet

 

ƒ Article de Corinne François-Denève

 

Le plateau est bien rangé : partagé en deux parts égales, il se divise en deux espaces qui n’ont rien à voir entre eux. A jardin, des monticules délicats, couverts de pelouse synthétique, d’arbres, avec, au loin, un cerf, qu’on a déjà vu dans nombre de Shakespeare. A cour, une enfilade de tables en bois géométriquement agencées, couvertes de livres, de cahiers, de bocaux, d’une maquette qui semble reproduire les monticules de gauche, et d’un renard empaillé – un vrai cabinet de curiosités dont on ne sait s’il appartient au XVIIIe ou aux années trente. Au centre serpente une allée, qui représente sans doute le mitan entre cet intérieur et cet extérieur. Les acteurs l’arpentent, entrent et sortent par deux autres entrées, escaladent les monticules, zigzaguent entre les tables. On ne saura pas, toutefois, ce que cette magnifique scénographie représente : le désir d’expérimentation de M. Orgon, nouveau Zola, avide de voir les effets du travestissement sur sa fille et son futur gendre ? Si la partie « pelouses » est largement exploitée (les acteurs y tombent, d’amour, on les espère moelleuses), celle du laboratoire l’est moins, les acteurs se contentant de caresser d’un air ennuyé le renard empaillé (désir de raviver la flamme ?) ou de s’asseoir, un peu.

Le père et le frère sont en grande tenue XVIIIe, visage blanc et joues rouges ; les jeunes comédiens en années 30 – pour symboliser un choc de générations ? Mario entre un crâne à la main, Hamlet italien étrangement narquois. Sylvia, Lisette, Bourguignon/Arlequin et Dorante ont parfois aussi le visage blanchi. On sent que Benoît Lambert veut « revisiter » Marivaux, le moderniser : dans sa mise en scène, les effets sont souvent burlesques, et arrachent les rires du public. Sur scène, les jeunes comédiens issus de l’ERACM déploient une grande fraîcheur et nous affolent de leur beauté, tandis que leurs aînés (Robert Angebaud, Etienne Grebot) semblent les encadrer avec bienveillance.

Ce Jeu se déroule avec fluidité, sans trop d’ennui, sans trop de joie. On pense à Jean-Pierre Vincent. Cependant, ce n’est plus le méchant Brechtien, mais le gentil. Sauf à la fin. Quand les deux domestiques s’en vont, valise en main, classes laborieuses toujours vaincues, regard triste vers les grands de ce monde, qui les regardent de loin, d’en haut, le « saute marquis » d’Arlequin, bravache autant que tendre, émeut enfin.

 

© Vincent Arbelet

 

Le jeu de l’amour et du hasard, de Marivaux

 

Mise en scène Benoît Lambert

Assistanat à la mise en scène  Raphaël Patout

Scénographie et lumière  Antoine Franchet

Son  Jean-Marc Bezou

Costumes  Violaine L. Chartier

Coiffures et maquillage  Marion Bidaud

Régie générale et lumières  Julien Poupon

Avec  Robert Angebaud, Rosalie Comby, Etienne Grebot, Edith Mailaender, Malo Martin, Antoine Vincenot

 

Durée  1 h 40

Du 26 septembre au 21 octobre 2018
Du mardi au samedi à 20 h, le dimanche à 16 h

 

Théâtre de l’Aquarium
La Cartoucherie
route du Champ de Manœuvre
75012 Paris

 

Réservations : 01 43 74 99 61

www.theatredelaquarium.net

 

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