À l'affiche, Critiques // Le froid augmente avec la clarté, librement inspiré de L’Origine et La Cave, de Thomas Bernhard, mise en scène Claude Duparfait, La Colline

Le froid augmente avec la clarté, librement inspiré de L’Origine et La Cave, de Thomas Bernhard, mise en scène Claude Duparfait, La Colline

Mai 21, 2017 | Commentaires fermés sur Le froid augmente avec la clarté, librement inspiré de L’Origine et La Cave, de Thomas Bernhard, mise en scène Claude Duparfait, La Colline

ƒƒƒ article de Nicolas Brizault

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© Jean-Louis Fernandez

Claude Duparfait s’est inspiré de deux ouvrages autobiographiques de Thomas Bernhard, L’Origine et La Cave, pour en faire un « rêve de scène », comme il aime qualifier sa façon de travailler, illustrant l’adolescence et la toute jeunesse de Thomas Bernhard, à la fin de la Seconde Guerre mondiale et durant les années qui suivirent. Claude Duparfait est sur scène une sorte de Thomas-Bernhard-auteur, Annie Mercier, Pauline Lorillard et Florent Pochet seront des Thomas-Bernhard-écrits, communiquant les uns avec les autres, avec le « vrai » aussi, en montrant les différentes phases, les différentes strates, idées, douleurs, questions, envies de ce jeune Bernhard. Thierry Bosc deviendra le personnage à la fois majeur et nécessaire à dépasser du grand-père, l’écrivain Johannes Freumbichler.

Voici donc les grandes lignes pour « Le froid augmente avec la clarté », titre que Claude Duparfait a tiré d’un discours que Thomas Bernhard prononçât à Brême en 1965. On est d’abord plongé dans la fin du nazisme, à Salzbourg, dans un institut national-socialiste où Bernhard se réfugie dans un placard à chaussures pour jouer du violon et se demander s’il doit se suicider ou non pour fuir tout cela. Viennent les bombardements de 1945, où Thomas Bernhard découvre le vrai visage de la guerre, ses décombres et ses cadavres. Son collège est ensuite transformé en institut catholique où il doit continuer ses études, sous la même solitude et la même souffrance, les portraits d’Hitler étant remplacés par des crucifix mais les façons de tenir les hommes, de les empêcher de penser, d’être libres étant plus ou moins identiques.

Thomas Bernhard va fuir tout cela un matin, à seize ans, en choisissant d’aller « dans le sens opposé », se diriger vers les marginaux, les pauvres, la douleur, tout cela en travaillant dans la cité de Scherzhauserfeld, une banlieue surnommée « l’enfer », et qui pourtant lui apprendra à être lui-même. Claude Duparfait nous entraîne dans tout cela, à travers les mots de Bernhard, à travers ses propres mots, écrits pour mieux nous offrir les clés multiples de L’Origine et La Cave, toutes les voies fantastiques de Bernhard, où l’on peut se perdre et quel bonheur ! tomber sur ces quelques mots qui ouvrent la voie ! On se perd et on se retrouve, illuminés et dans le froid. Annie Mercier décrivant les trois premières années de la vie des enfants, et la perte infinie pour des centaines et des milliards d’âmes à venir ! Magique ! Splendide ! A filmer et à diffuser dans les maternités du monde entier !

Un véritable amour de Claude Duparfait pour ce qu’écrit Thomas Bernhard est palpable ici, partout. Tout est prenant, bavard, dans les ruines, le sang, Thomas sous toutes ses formes, des hommes, des femmes, son grand-père à la fois merveilleux et pas assez, pas jusqu’au bout, qui « met au monde » son petit-fils mais sans lui apprendre à marcher, comme il le fera seul dans cette cave sordide et terrible où pourtant éclatera son sourire ! La mise en scène est prenante, oui, on pourrait être en train de lire, on pourrait être en train d’écrire, on ne sait plus, on ne se pose pas la question, on est là, tout près de Thomas Bernhard. Les mots volent, portés par des corps présents, des corps passés ? L’obscurité et la lumière se superposent, montrent ce que la douleur, la peur, savent parfois faire jaillir en nous. Tout est actuel – hélas – dans ce spectacle, dans ces coups de poings dans les murs pour nous montrer que nous sommes des hommes, des femmes, vivants.

Le froid augmente avec la clarté,
Librement inspiré de L’Origine et La Cave, de Thomas Bernhard
Un projet de Claude Duparfait
Avec Thierry Bosc, Claude Duparfait, Pauline Lorillard, Annie Mercier, Florent Pochet
Assistanat à la mise en scène Kenza Jernite
Scénographie Gala Ognibene
Son et image François Weber
Lumière Benjamin Nesme
Costumes Mariane Delayre
Le décor a été réalisé par les ateliers de La Colline et les costumes par les ateliers du TNS.
Coproduction La Colline – Théâtre national, Théâtre national de Strasbourg, avec le soutien du FIJAD (Fonds d’Insertion pour Jeunes Artistes dramatiques)
Les récits L’Origine et La Cave sont publiés aux éditions Gallimard.

Du 19 mai au 18 juin 2017
Du mercredi au samedi à 20h, le mardi à 19h et le dimanche à 16h

Petit Théâtre
La Colline – Théâtre national
15 rue Malte-Brun
75020 Paris
Billetterie 01 44 62 52 52
www.colline.fr

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