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Le cinéaste Claude Chabrol est décédé

Sep 12, 2010 | Aucun commentaire sur Le cinéaste Claude Chabrol est décédé

Le cinéma porte le deuil d’un de ses grands réalisateurs              

Claude Chabrol, décédé dimanche à l’âge de 80 ans, croquait, à travers une oeuvre prolifique, les travers de la bourgeoisie de province avec la même gourmandise qu’il mettait à en savourer la cuisine. Le visage rond caché par de larges lunettes, qu’il abandonnera en 1995 après une opération de la cataracte, il était l’un des réalisateurs français les plus populaires, connu pour son humour noir et son goût de l’autodérision. Son oeuvre (environ 60 films pour le cinéma et une vingtaine pour la télévision) avait été couronnée par le Prix René Clair de l’Académie française en 2005 et le Grand prix 2010 des auteurs et compositeurs dramatiques. Chabrol a été révélé au grand public dès son premier film, Le beau Serge (1958, prix Jean Vigo et le Grand Prix du Festival de Locarno), devenant un des porte-drapeau, avec François Truffaut et Jean-Luc Godard, de la Nouvelle Vague.  

Fumeur de pipes (et de cigares), il cachait, derrière une apparente bonhomie, un certain plaisir à montrer la cruauté. « A partir d’une certaine monstruosité, les gens préfèrent ne pas penser que c’est possible, c’est là que mon travail commence », déclarait-il sans se départir d’un sourire malicieux. Il s’était imposé comme une sorte de moraliste capable de transformer un simple fait divers en un conte féroce où se révélaient les aspects les plus sombres des hommes. « Mon goût pour le polar remonte à l’enfance, expliquait-il, quand je lisais Agatha Christie. Un mauvais polar vaut toujours mieux qu’un autre mauvais film. Normal, parce qu’il touche à des questions graves, la vie, la mort, le bien, le mal, mais sans aucune prétention ». « J’utilise le cadavre comme d’autres utilisent le gag », ajoutait celui qui a dressé un portrait particulièrement corrosif de la France des années 70.

Né le 24 juin 1930 à Paris, Claude Chabrol est issu de la moyenne bourgeoisie. Son père est pharmacien. Il quitte Paris durant la guerre pour se réfugier à Sardent, dans la Creuse. Elève modèle – licencié en lettres et en droit, il décourage pourtant ses parents, qui désirent le voir reprendre l’officine paternelle, en quadruplant sa première année de pharmacie. Passionné de cinéma, il devient critique dans des revues spécialisées puis dans les célèbres Cahiers du cinéma. Attiré par Alfred Hitchcock, il publie en 1957 un ouvrage, avec Eric Rohmer, sur l’auteur de Psychose. Il partage avec le maître anglais la même ironie, le même attrait pour l’horreur et y ajoute sa subtile et amère analyse sur la vanité des hommes, en particulier celle de la bourgeoisie. C’est grâce à l’héritage de sa première femme – « Sa grand-mère avait eu la bonne idée de mourir pendant que j’écrivais le scénario », disait-il – qu’il a l’argent nécessaire pour se lancer dans le cinéma.

Ce boulimique de la pellicule va alors considérer le cinéma comme un « hobby », tournant film sur film à la cadence moyenne d’un par an. Il signe de grands films comme Le boucher (1970), Les noces rouges (1973), Violette Nozière (1977), La cérémonie (1995) mais aussi, selon sa propre expression, des « films alimentaires » comme Folies bourgeoises (1976), alternant films parisiens et films provinciaux où, selon lui, plus qu’à Paris, la nature humaine y apparaît plus nettement. Sur le plateau, il se montre jovial, donne peu de directives aux acteurs et aux techniciens avec lesquels il entretient souvent des relations amicales après le tournage. « On peut très bien prendre les choses au sérieux sans les traiter avec sérieux », disait ce grand sceptique selon lequel « les certitudes font partie des malheurs de l’existence. Ce n’est pas mal d’être sûr de rien ». Il aimait tourner avec ses acteurs-fétiches : Isabelle Huppert (Une affaire de femmes, 1988), son ex-épouse Stéphane Audran (La femme infidèle, 1968), Jean Poiret (Inspecteur Lavardin, 1985) ou Michel Bouquet (Poulet au vinaigre, 1984).

Producteur, acteur, dialoguiste, il avait réalisé également des oeuvres historiques (L’oeil de Vichy, 1993) et avait été conteur d’histoires à « frémir debout » sur Radio France. Marié trois fois, Claude Chabrol était père de quatre enfants.

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