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Le Chant du Cygne et L’Ours, d’Anton Tchekhov, au Studio-Théâtre-Comédie Française

Jan 24, 2016 | Commentaires fermés sur Le Chant du Cygne et L’Ours, d’Anton Tchekhov, au Studio-Théâtre-Comédie Française

ƒƒƒ article de Florent Mirandole

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 © DR

Le temps passe trop vite au Studio-Théâtre-Comédie Française. Pendant une petite heure, Maëlle Poésy met en scène deux courtes pièces d’Anton Tchekhov. Construite pour traiter deux faces d’un même thème, l’homme face au temps qui passe, Le Chant du Cygne s’avère être un concentré d’émotion et d’inventivité. Vassili Vassiliévitch Svetlovidov, vieil acteur fatigué, se retrouve seul dans sa loge un soir après la représentation. Les lumières pâlottes font vaciller sa large ombre, le silence a envahi la petite loge, et l’acteur petit à petit est saisi par l’angoisse. Il n’a jamais été un jeune premier, et n’a plus l’âge depuis longtemps de l’être. Au fond d’une vieille bouteille, il contemple ses regrets. Mais l’arrivée du jeune souffleur, surgi comme par magie des entrailles du théâtre, redonne un dernier souffle de vie à cet homme épuisé. Revigorée par le jeune souffleur, la grande carcasse usée se déploie alors pour un dernier rappel. Perché sur une chaise, éclairé par les trouvailles du souffleur, l’homme semble jeter un dernier regard sur la somme d’une vie, sur les quelques grands rôles qu’il n’a jamais eu, le Roi Lear, Othello…. Toute l’intelligence de la pièce est d’avoir confié le premier rôle à Gilles David, dont la grande carrure permet de donner encore plus de souffle à son dernier élan final, finalement aussi ébouriffant que crépusculaire.

Cette pièce intime et mélancolique est suivie de L’Ours, autrement plus joyeuse. Alors que tout semble finir dans Le Chant du Cygne, tout recommence dans L’Ours. Si l’on passe du tragique à la comédie, le thème de l’homme face au constat de sa vie reste le fil rouge de la pièce. Grigory Stépanovitch Smirnov, un ancien créancier qui vient demander en urgence son paiement à une jeune veuve éplorée, se heurte à une résistance farouche. En moins de 30 minutes les deux acteurs dynamitent le plancher du Studio-Théâtre par leur affrontement. Benjamin Lavernhe en particulier, tout en violence contenue, aussi drôle qu’effrayant, s’approche de la folie. Rapidement rejoint par Julie Sicard, en une poignée de minutes le couple nous emmène dans des sommets de la comédie, portant à ébullition des sentiments que chaque personnage croyait éteints. Le dénouement n’en est que plus éruptif.

De ces deux pièces ressort un message profondément humaniste. Face au temps, face à la vieillesse, ou à la mort de l’autre, Tchekhov semble montrer que l’homme n’est pas condamné. Par l’art, ou par l’amour, il est toujours possible de lutter contre les horloges qui tournent, et de retrouver un nouvel élan vital.

Le Chant du Cygne et L’ours
Texte Anton Tchekhov
Texte français Georges Perros et Génia Cannac
Adaptation Maëlle Poésy et Kévin Keiss
Mise en scène Maëlle Poésy
Scénographie et costumes Hélène Jourdan
Lumières Jérémie Papin
Son Samuel Favart-Mikcha
Dramaturgie Kévin Keiss
Avec Julie Sicard, Gilles David, Benjamin Lavernhe, Christophe Montenez

Du 21 janvier au 28 février 2016
Du mercredi au dimanche à 18h30

Comédie-Française
Studio-Théâtre – 99 rue de Rivoli – 75001 Paris
Renseignements et réservations 01 44 58 98 58
www.comedie-francaise.fr

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