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L’acte inconnu, de Valère Novarina et Céline Schaeffer à la Maison des Métallos

Mai 21, 2016 | Commentaires fermés sur L’acte inconnu, de Valère Novarina et Céline Schaeffer à la Maison des Métallos

Article de Camille Scordia

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© Christophe Pean

L’acte inconnu a été créé en 2007 au Festival d’Avignon. Il est présenté ici dans sa version haïtienne, interprété par une équipe de sept comédiens de la compagnie « Nous théâtre » dirigée par Guy Régis Jr.

Cette pièce est une plongée dans l’univers du langage, propre à Novarina. Une troupe de personnages changeants, aux milles visages, explore et déconstruit le langage à coup de néologismes, expressions oralisées, figures de rhétoriques et retournements de sens. Ils se meuvent dans un décor peint, accompagnés par un musicien accordéoniste, ponctuant le récit de nombreux chants haïtiens. C’est de ce syncrétisme issu du mélange entre la langue de Novarina et des cultures haïtienne et créole que procède la dynamique de ce spectacle, porté par des comédiens à l’énergie contagieuse.

Sont évoquées les nombreuses questions sous-jacentes à la réflexion sur le langage : l’instrumentalisation du langage par les politiques – le fameux jargon – à des fins électorales et l’origine des mots et la transformation de leur sens : le propre d’une langue vivante.

La fragilité de cette proposition réside dans le fait de traiter du langage au théâtre avec une troupe issue d’un autre pays. C’est en même temps une richesse – car le langage procède d’une circulation du sens entre les cultures, et une prise de risque. Les comédiens ayant un fort accent en français, il est parfois véritablement difficile de saisir les mots, les phrases, le sens. Dès qu’un mot n’est pas compris, c’est toute une phrase qui est mal entendue, ce qui est loin d’être anecdotique au théâtre. Cette faiblesse entame beaucoup la portée du spectacle, car il est compliqué d’entrer dans une pièce dans ces conditions, d’autant plus dans une pièce adaptée d’un texte qui évoque la linguistique.

Le texte de Novarina n’est pas narratif, il ne raconte pas une histoire au spectateur, mais l’invite à s’interroger sur le langage. Il n’y a donc pas de développement d’une intrigue ni de caractérisation de personnages, qui sont des figures changeantes, sans identité, venues incarner des questions théoriques en les faisant entendre sur scène. La force de la pièce repose donc sur le mot, sans véritable dramaturgie.

Ainsi, L’acte inconnu demeure assez opaque. Malgré la qualité du jeu de certains comédiens, qui travaillent en plus sur le sens des gestes et des mouvements du corps, la dynamique crée par une musique omniprésente, qui nous évoque son importance dans des cultures orales, il reste bien difficile de comprendre le propos de la pièce, lorsqu’on ne connaît pas au préalable le texte de Novarina. Or, le théâtre est justement là pour nous faire entendre, comprendre, montrer et ressentir la force d’un texte. D’où une certaine frustration chez le spectateur lambda, qui n’aura pas forcément pris le soin de lire Novarina avant de se rendre au théâtre.

L’Acte Inconnu
Mise en scène de Valère Novarina et Céline Schaeffer
Texte : Valère Novarina
Collaboration artistique : Guy Régis Jr

Avec Edouard Baptiste, Bedfod Valès, Anyès Noël, Jean-MArc Mondésir, Ruth Jean Charles, Finder Dorisca,

Scénographie : Céline Schaeffer, Richard Pierre et Valère Novarina
Régie générale : Richard Pierre
Du mercredi 18 au samedi 28 mai 2016
du mardi au samedi à 20h, samedi à 19h
Durée : 1h35

Maison des Métallos
94 rue Jean-Pierre Timbaud
75011 Paris
01 47 00 25 20

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