ƒ article de Nicolas Brizault
Les aléas de l’au-delà, les envies d’y rester ou pas. Ce sont tous les tourments que présente La Morsure de l’âne, les questions, les surprises, les étonnements sombres. Une âme en salle d’attente, celle de Paco, rencontre un âne, au corps d’homme, la tête d’âne simplement. L’âme appartient encore à un homme, qui ne sait pas encore complètement où il est, en salle de réanimation, au paradis, nulle part ? Elle discute avec l’âne, joue un peu avec lui, l’un porte l’autre et vice-versa. Le tout sur un disque sombre, en lente avancée. Les mouvements se ralentissent, n’existent plus, reviennent. L’âne mord régulièrement le corps perdu, pour lui rappeler qu’il n’est pas encore tout à fait ailleurs. La poésie du sujet de cette pièce est là, pleine et entière, scénographie splendide, échanges sympathiques. On pense être pris par cette morsure, se mettre lentement à tourner avec elle.
Puis l’âne disparaît. Félicitations rayonnantes à qui comprendrait véritablement comment, pourquoi. Il n’est plus sur scène, l’âme reste seule dans ses soucis de la presque mort, bientôt rejointe toutefois. Par qui ? Pourquoi ? Allez savoir. Une femme à la superbe robe rouge, dont on ne comprend pas qui elle est, ce qu’elle représente, qui elle est, était. Elle est là, disparaît, revient. Des images de petites filles discutent entre elles, se disputent un peu au sujet de cet homme mort ou pas. Sont-elles nées toutes les deux ? Non. Mystère pas forcément désagréable toutefois. Et les personnages se multiplient, sans abus, non, mais les thèmes rôdant l’intérieur du cercueil vont et viennent. Lentement. Avec une lourdeur quasi infinie. Le spectateur aussi se demande où il est. Se noie dans le poids de ces images mortuaires. La gaité du suicide. L’âme et le corps de Paco se ligotant de question sans fin. La mort qui débarque et se plaint, en gros personne ne l’aime, raison de râler sans fin. Lenteur, longueur, malaise et noirceur infinie. Une fin, qui fait des petits, sinon « ouf » serait mort lui aussi.
Oui et alors ? C’est une pièce sombre, au thème réfrigérant qui nous fait faire des cauchemars − pour de vrai – et alors donc ? Eh bien La Morsure de l’âne fait partie du Parcours Enfance Jeunesse. Pourquoi, comment ? On sort de là pétri d’ennui, recherchant cet âne disparu, on se demande comment ce thème, surtout comment de cette façon ce thème est censé se diriger vers des enfants. Rebondissant à leur arrivée salle des Abbesses, puis assez silencieux jusque dans le métro. Déçus ? Paumés ? Regardez chers enfants, régulièrement en vie vous serez anéantis, comme les grands autour de vous ce soir. Préparez-vous, la mort n’est pas un jeu, certes, le poids incompris essaie parfois de rebondir sur scène. Cela fait mal, comme une morsure bien jouée.
La Morsure de l’âne, de Nathalie Papin
Mise en scène d’Emilie Le Roux
Assistante à la mise en scène : Fanny Duchet
Scénographie : Stéphanie Mathieu
Lumières : Éric Marynower
Son : Gilles Daumas
Interprétation musicale : Théo Ceccaldi (violon & conseil), Manon Gillardot (violoncelle), Roberto Negro (piano),
Enregistrement & mixage : Mathieu Pion
Vidéo : Pierre Reynard
Costumes : Laëtitia Tesson
Réalisation scénographie : Nicolas Picot
Ateliers de décors du TMG : Pierre Ploteau
Avec Dominique Laidet, Lou Martin-Fernet, Martine Maximin, Jonathan Moussalli, Najib Oudghiri
Durée 1 heure
Du 22 au 26 novembre 2022
À 10 h, 14 h 30, 15 h, 19 h selon les jours de représentation.
Goûter Philo samedi 26 novembre à 16 h
Spectacle conseillé à partir de 10 ans
Théâtre Les Abbesses
31 rue des Abbesses
75018 Paris
Réservations :
01 42 74 22 77
theatredelaville-paris.com
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