ƒƒ article de Nicolas Brizault

© Tristan Jeanne-Valès

La petite femme en robe noire devant le rideau baissé, c’est Marilù Marini. Elle va, elle vient, prête à vous dire où vous asse oir. Elle entre dans un personnage que l’on n’imagine pas encore. Puis tout se densifie, débute, éclate subitement à travers cette magicienne voguant entre une femme épuisante, étrange et vociférante, drôle et neurasthénique, caricature d’une autorité dominatrice et faiblarde… « La journée d’une rêveuse » et Le Rio de la Plata, de Copi, s’envolent, se mêlent, Marilù Marini en devient le déversoir radieux, dragueur et irréel.

Marilù Marini avait proposé à Pierre Maillet l’idée de faire un spectacle sur son compatriote de Buenos Aires, Copi, mort il y a juste trente ans. Copi avait laissé ses traces lumineuses en France avec ses dessins dans Libération, Le Nouvel Observateur ou Charlie Hebdo, et aussi dans des pièces de théâtre, son humour décalé tirant à grand bruit des sonnettes d’alarme toujours bien actuelles. Cette envie aimante a donné naissance à une adaptation de l’écriture de Copi, toujours aussi libre, où le génie et la force d’une femme, sa fulgurance, nous tiennent, nous séduisent et nous malmènent.

Marilù Marini n’est pas seule et torture avec joie le très bon pianiste Lawrence Leherissey, pour qu’un peu d’excellente justesse ne soit pas trop malvenue. Le talent de l’un avale celui de l’autre et réciproquement, alors on abandonne le dos nu du pianiste pour ce Copi-dame réincarné, mêlé à ses personnages, qui eux-mêmes laissent à nouveau un peu de place à cette femme piquante et irréelle, dragueuse et morte. Marilù Marini est partout, furie elle tient tout, et le résultat est fascinant.

Copi et tous ses débordements, son humour si vaste où tourbillonnent la vie, la mort, la drague, le sexe, la peur, la politique et l’exil, sont en accord surprenants avec la pureté de la mise en scène, qui rejoint celle du dessin : à la fois légèreté et caricature du jeu, du corps, de la voix. Les textes se mélangent, se découpent et s’opposent, se réunissent, si différents mais offerts, indiscernables, par la même diva plus ou moins divine en robe longue. Qui est qui ? Peut-être une lassitude polie se fait annoncer à un certain moment, celui des gouttes autobiographiques peut-être, puis l’idée de l’ennui renonce, une énergie vive reprend, on entend des voix et l’on court après le pianiste.

La journée d’une rêveuse (et autres moments…)
De Copi
Adaptation et mise en scène Pierre Maillet
Avec Marilú Marini
Piano Lawrence Leherissey
Avec les voix de Marcial Di Fonzo Bo, Michael Lonsdale et Pierre Maillet
Lumières Bruno Marsol
Son Manu Léonard
Costumes Raoul Fernandez
Maquillage Jean-Luc Don Vito
Assistanat à la mise en scène Sébastien Ribaux et Thomas Jubert
Réalisation décor et costumes Les Ateliers de la comédie de Caen
Sous la direction de Benoit Gondouin
Tailleur costume du pianiste Julien de Caurel

Du 2 au 21 mai 2017
Salle Renaud-Barrault 18h30

Théâtre du Rond-Point
2bis avenue Franklin D. Roosevelt – 75008 Paris
M° Franklin D. Roosevelt
Réservations 01 44 95 98 21
www.theatredurondpoint.fr

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