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La Collection, de Harold Pinter, mise en scène de Ludovic Lagarde, Théâtre des Bouffes du Nord

Mar 10, 2019 | Commentaires fermés sur La Collection, de Harold Pinter, mise en scène de Ludovic Lagarde, Théâtre des Bouffes du Nord

 

© Gwendal Le Flem

 

ƒƒƒ article de Nicolas Brizault

La Collection. Une des merveilles de Harold Pinter, écrite en 1961. Comme le dit Ludovic Lagarde, qui a mis en scène cette pièce, seule la cabine téléphonique a disparu. Le reste, suivant, expliquant, éclairant peut-être le titre même, La Collection, reste un mélange de froideur, de mensonge, de désir, d’humour, de violence tentée, une valse entrecoupée, rêche et douce, rapide, aimant et cherchant à frôler des points d’interrogation quasi transparents. De l’évidence et de l’insaisissable.

Nous sommes à Londres. Harry a sorti Bill d’une vie sombre pour qu’il développe son talent de couturier et ils vivent dans une villa de Belgravia. Quartier chic, c’est évident, amour, mille doutes, début des questions naines et discrètes. Stella et James, mariés depuis deux ans, habitent eux à Chelsea. Petit détail, ces deux espaces sont devant nous collés l’un à l’autre, différents et proches, opposés et pourtant liés, allez savoir pourquoi, comment. Le thème de cette pièce ? Autre détail, costumes cette fois-ci : Harry et Bill nous rappellent un autre couple, affaires et coutures, splendide !

Stella et Bill créent, sans se connaître, des vêtements. Vous savez, les outils qui nous recouvrent, nous désignent, nous dissimulent. La Collection débute. James téléphone, encore et encore, inconnu pourtant à Belgravia, sonne à la porte, soupçonné par Harry, allez savoir, d’être un amoureux de plus de Bill, un homme. Il rencontre enfin Bill, expulse et tient encore sa colère : il y a eu très récemment un salon Haute couture à Leeds. Bill et Stella ont couché ensemble.

La boîte est ouverte, les oui, non, pleuvent, on sait, on ne sait pas. Stella avoue et explique, Bill donnent des détails. L’assassinat est proche. Et puis allez savoir, les contraires sont là. Tout est certitude, incertitude, comme des coups silencieux ou non glissants les uns après les autres. Ludovic Lagarde joue avec le texte de Pinter, nous l’expose avec la même force, le même tumultueux silence, les mêmes cris, les mêmes rires froids. Les questions pleuvent face à face, rebondissent et deviennent des images, les masques ouvrant et clôturant le spectacle en sont une preuve. Silence. Lagarde réussit à rendre cette subtilité, l’heure devient, comment dire, « palpable ». Trois heures du matin pèsent. Ailleurs la lenteur du week-end est là. Et jusqu’à l’odeur fine de l’alcool nous entoure. Lagarde nous fait du bien et du mal. Nous sortons de là sans en savoir plus, secoués, perdus. L’opposé du Boulevard éclaboussant. Du possible, du sauvé, un homme jaloux ? Le même qui suit très tard dans la nuit l’éventuel amant de sa femme à l’étage, là où se trouvent sans doute les chambres, loin de la porte d’entrée en tout cas. Lagarde gagne par ce type de détails. Ils sont multiples, construisent la pièce.

Nous sommes à Londres, oui, nous en sommes certains. Harold Pinter nous tient dans sa main grande ouverte et fait circuler devant nous toutes les raisons, les explications, les idées naissantes. Et les efface. Puis elles renaissent. Torture et légèreté. Oui, il nous tient. On ne saisit qu’une chose, ou bien trois, nouveau mystère celui-ci rapidement résolu, écriture – et traduction – mise en scène et jeu exposent une essence certaine du talent.

 

© Gwendal Le Flem

 

La Collection, de Harold Pinter

Mise en scène de Ludovic Lagarde

 

Traduction Olivier Cadiot

Dramaturgie Sophie Engel

Scénographie Antoine Vasseur

Collaboration à la scénographie Éric Delpla

Costumes Marie La Rocca

Maquillages, perruques et masques Cécile Kretschmar

Son David Bichindaritz

Vidéo Jérôme Tuncer

Assistante à la mise en scène Céline Gaudier

Assistante à la traduction Sophie Mickeown

Assistante costumes Peggy Strum

Stagiaire à la mise en scène Lisa Pairault

Couturière Armelle Lucas

Assistante maquillages, perruques et masques Mityl Brimeur

Régie générale François Aubry

Régie plateau Éric Becdelièvre

Régie lumière Sylvain Brossard

Construction du décor Atelier du Grand T – Nantes

 

Avec Mathieu Amalric, Valérie Dashwood, Micha Lescot, Laurent Poitreneaux

 

 

Du 07 au 23 mars 2019

 

Du mardi au samedi à 20h30

Matinées les samedis à 15h30

 

 

Théâtre des Bouffes du Nord
37bis Boulevard de la Chapelle

75010 Paris

 

Réservation 01 46 07 34 50

www.bouffesdunord.com

 

 

 

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