ƒ article de Florent Mirandole

Phrases creuses, brouhaha et langue de bois. Ce triptyque résume bien le fil directeur de « Votez Poupon », le premier des 5 épisodes de « La Chienlit ». Les habitants du quartier du lac, quartier quelconque « aux confins d’une grande métropole » à peine animée par le trafic de cannabis, ont décidé de se mobiliser contre leur maire, dépassé par une grève des éboueurs. Réunie chez le susnommé Poupon, la poignée d’habitants crée l’association de riverains en colère. Mais faute d’expérience et d’organisation, la réunion s’enlise rapidement au milieu des déclarations creuses pourtant pétries de bonne volonté.

La petite troupe déploie un talent particulier pour peindre les charmes et les ridicules de ces militants en herbe. Plongé dès l’ouverture dans un brouhaha assourdissant, le spectateur désorienté cherche en vain des bribes de sens à la réunion qui se tient devant lui. Du défaitiste compulsif à la féministe jalouse de son temps de parole, la petite troupe d’acteurs peint avec un plaisir certain une mosaïque de personnages tous aussi réjouissants et agaçants les uns que les autres.

A peine commence-t-on à discerner un semblant d’organisation au milieu de cet amoncellement indigeste de phrases creuses et d’excuses narcissiques, que le spectateur est confronté au vide sidéral d’un discours politique. Dans un exercice d’autocélébration qui semble si familier, le maire de la commune évoque tour à tour la « responsabilité de l’agglo » et la « confiance dans l’avenir » qui l’anime. La parole maitrisée répond en écho à la joyeuse pagaille de l’association. Rythmées et amusantes, ces scènes soulignent pourtant les limites du discours, vain et creux au final.

L’originalité de la pièce est d’être entrecoupée de flashbacks, revenant sur les origines de la mobilisation. On découvre l’improvisation qui a régné à l’origine de la création de l’association. La réunion initiale a-t-elle été organisée par un locataire du Bâtiment C ? Par le locataire d’en dessous ? A moins encore que ce soit le fait de la propre femme du citoyen Poupon. Le « votez Poupon » du titre résonne ironiquement, alors même que son élection à la tête de l’association semble n’avoir été que le fait du hasard.

Ce premier épisode s’avère très agréable à regarder, et donne envie de revenir pour les 4 épisodes suivants. La troupe s’appuie toutefois trop sur les répétitions pour souligner le ridicule des personnages. Le retour incessant des phrases stéréotypées (« l’argent appelle l’argent, c’est évident ») ou des postures sociales de chacun finit par ennuyer plus qu’amuser. On peine ainsi à s’attacher à un ou plusieurs personnages pour être réellement embarqué dans l’aventure. Mais ce premier épisode reste prometteur. A suivre.

La Chienlit 
Texte et mise en scène Alexandre Markoff
Avec André Antébi, Jacques Bourgaux, Jérémy Buis, Juliette Chaigneau, Léonore Chaix, Ivan Cori, Sébastien Delpy, Nicolas Di Mambro, Matthieu Fayette, Sophie de Furst, Sylvain Tempier, Aline Vaudan

Les lundis suivants à 20h :
Épisode 1 (21 et 28 septembre 2015 – COMPLET),
Épisode 2 (23 et 30 novembre 2015),
Épisode 3 (1er et 8 février 2016),
Épisode 4 (4 et 11 avril 2016),
Épisode 5 (23 et 30 mai 2016)

Théâtre 13 / Seine
30, rue du Chevaleret – 75013 Paris
M° Bibliothèque François Mitterrand
Réservation 01 45 88 62 22
www.theatre13.com

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