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K surprise, de Sarah Péb’, mise en scène Élise Mc Leod, Les Déchargeurs, Paris

Mai 02, 2019 | Commentaires fermés sur K surprise, de Sarah Péb’, mise en scène Élise Mc Leod, Les Déchargeurs, Paris

ƒƒ article de Nicolas Brizault

K surprise est l’histoire du cancer du sein de Sarah Péb’, (Pébereau pour les intimes). Un cancer à trente ans, elle ne comprend pas, ce n’est pas le moment, c’est beaucoup trop tôt, vraiment, on ne peut pas attendre un peu ? L’annonce des médecins, l’annonce à la famille, l’annonce ou non aux amis, leurs réactions, les traitements, la trouille, les questions, les réponses ou pas, ou vraiment mal « construites », comment trouver un mec, déjà sans cancer ce n’est pas facile, alors avec, comment dire… la vie pendant toute cette période étrange, violente, cette période où l’on s’aperçoit combien cette garce de vie est belle.

Ce spectacle est né du livre de Sarah Pébereau (Sarah, 30 ans, mon cancer même pas peur !), racontant sans complexe l’installation de cette maladie, et tout le reste. Un livre peut-être écrit pour se débarrasser jusqu’au bout d’un cancer, oui, et sans doute aussi une main tendue pour celles et ceux qui sont plongés dedans, et ceux qui sont tout autour sans trop savoir quoi faire. La peur, les larmes, les points d’interrogation, les coups de poing mérités ici ou là, les bises infinies de remerciements.

Sarah Péb’ prend le public à témoin, nous entraîne, nous raconte, nous invite même à suivre ce rythme après le spectacle, dans un bar, peut-être avec son mini lapin en peluche, qui sait, un lapin sans doute repère et attache magique, le plus fort de tous, le fruit de la résistance ? Le résultat est costaud, sans aucun doute. Sarah Péb’ et Élise Mc Leod ont souhaité mettre en volume, en son, en lumière toutes ces idées, tous ces souvenirs sur scène. Un fauteuil résume les rapports plus familiers, une chaise rigide sert de salle d’attente, se transforme en cabinet des différents médecins, en lit ce curieux lit roulant inéluctablement vers l’anesthésie, l’opération et … ?

La lumière fixe le lieu, nous dirige, puis elle se fait forte pour que les toubibs voient correctement, devient plus faible parce le moral fout le camp, la peur grandit. Sarah Péb’ nous parle, et devient sa mère, ses copines, ses médecins. Sa voix change, ultra-rapide pour une mère qui essaie de ne rien voir, de ne pas dire qu’elle a peur, un peu idiote pour les copines, lente et pesante pour les médecins. Bon, certes, on sent et comprend qui est qui et qui fait, dit quoi, mais cette perfusion entre humour et music-hall est un peu dommage. C’est pour apporter un peu de légèreté, ou bien Sarah Péb’ est née dans un élan humoristique et ne peut s’empêcher ? C’est pour échapper au retour de cette période, pour le coup, elle, loin d’être fort drôle ? On ne sait pas. Certes, ce n’est pas parce qu’on parle d’un cancer qu’il faut être sombre et sérieux, mais il nous faudrait sans doute être un peu moins paumés entre jour et nuit, positif et négatif. L’humour se ballade, certes, mais ce n’est pas lui qui ressort, ce n’est pas lui que l’on retient face aux tentatives parfois redontantes de Sarah Péb’.

Ce spectacle n’est pas écrasant de somptuosité théâtrale, mais on s’en fout. C’est sa simplicité déconcertante qui nous transporte, qui construit, fonde ce spectacle dans cet univers quasi nu hôpital-boîte de nuit-salle d’attente- pas vie-vie. C’est la force, la non-force de Sarah Péb’, Sarah Pébereau, son cancer, sa volonté de se tourner vers nous tous qui nous entraîne. K surprise va peut-être tourner dans des endroits où son sujet est primordial. On le souhaite, on croise les doigts. Cette histoire peut sans doute aider ici où là à faire sauter tous les panneaux de sens interdit entourant parfois, souvent, toujours ? la maladie. Elle peut permettre d’aller de l’avant ? Chacun son chemin, bien entendu, mais ce spectacle peut se transformer en une formidable et surprenante clé, une clé d’une heure et vingt minutes qui pourrait lancer – ou entendre – ici où là quelques « ouf », des « je t’emm… », des « je t’aime. »