© Marie Clauzade

ƒƒƒ article de Denis Sanglard

Reprise de la pièce de Jean-François Sivadier Italienne Scène et Orchestre et ça c’est une chouette idée, un vrai bonheur. Pour qui aime l’opéra et pour qui le déteste c’est l’occasion de découvrir les vrai-fausses coulisses d’une répétition, La Traviata de Verdi, de participer à l’élaboration laborieuse d’une mise en scène sous la houlette de Nicolas Bouchaud, au premier abord hystérique, lunaire et totalement cintré, d’entrer dans la fosse aux lions où rugit un chef d’orchestre qui vous mène à la baguette, Jean-François Sivadier lui-même, cafouillant des blagues avec un accent improbable. C’est la guerre totale, ouverte, des egos. Entre le plateau et la fosse, entre diva et divette. Contraintes d’un planning serré, contraintes techniques, contraintes syndicales, caprices et retards ajoutent aux conflits qui explosent ou menacent d’exploser. Chacun y met du sien entre bonnes et surtout mauvaises volontés qui transforment cette italienne, ce working progress, en champ de bataille lyrique et théâtral. Enfin comme le résume si bien le metteur en scène  « C’est pas qu’on patauge, c’est qu’on remonte le fleuve Yangtsé à la rame. » Ce qui aurait pu être un chapelet de situations et de portraits caricaturaux, de poncifs, est au contraire d’une rare et belle subtilité. Hommage à l’opéra et au théâtre, à ceux qui le font, de la diva au technicien, à leur fragilité et leur faiblesse, c’est une leçon magistrale sans être didactique sur un art qu’on souhaiterait populaire. « Vous devez jouer pour celui qui ne sait rien, qui vient à l’opéra pour la première fois. » Doucement les masques tombent et toute la complexité des personnages, loin de toute caricature dont se joue au début, pour mieux s’en débarrasser ensuite et avec malice, Jean-François Sivadier, apparaît. Au-delà de la situation c’est une réflexion magistrale et profonde sur l’art du comédien, de la mise en scène, de la musique, qui au long de cette création s’affranchit du fatras de clichés qui accompagne ordinairement un art au final méconnu. Et le rire fait place parfois à l’émotion quand craquent les certitudes des personnages à la recherche d’une vérité, d’un absolu, dans un monde qui n’est, en apparence seulement, qu’illusion, ou la fiction rejoint parfois et non sans danger la réalité. Derrière les conflits et les caprices, les logorrhées soudaines, c’est la peur qui vous cloue sur le plateau. Et l’intelligence de Jean-François Sivadier c’est de nous faire entrer de plain-pied dans ce processus de recherche et de réflexions. Attendus comme choristes c’est, dans la première partie, sur le plateau que nous nous installons, intégrés à la mise en scène, pris en charge par l’assistante et doublure dévouée. Avant dans la seconde de descendre, soudain musiciens, dans la fosse d’orchestre, attendu d’une baguette ferme par Jean-François Sivadier. Changement de perspective, mise en abîme vertigineuse qui fait de chaque spectateur un acteur légitime et surtout engagé et solidaire d’un groupe tout aussi malmené par le metteur en scène que le chef d’orchestre dont il devient de fait le partenaire hilare et complice.

Italienne Scène et Orchestre  texte et mise en scène de Jean-François Sivadier

Avec  Nicolas Bouchaud, Marie Cariès, Charlotte Clamens, Vincent Guédon, Jean-François Sivadier, Nadia Vonderheyden

Collaboration artistique  Véronique Timsit

Son  Jean-Louis Imbert

Lumière  Jean-Jacques Beaudouin

Du 9 au 28 juillet 2018 à 19h

Samedi à 16h

Relâche le dimanche

MC93

Maison de la culture de Seine-Saint-Denis

9 boulevard Lénine

93000 Bobigny

Réservations 01 41 60 72 72

reservation@mc93.com

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