À l'affiche, Critiques // Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée, d’Alfred de Musset mise en scène Laurent Delvert au Studio-Théâtre, Comédie Française.

Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée, d’Alfred de Musset mise en scène Laurent Delvert au Studio-Théâtre, Comédie Française.

Mar 27, 2017 | Commentaires fermés sur Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée, d’Alfred de Musset mise en scène Laurent Delvert au Studio-Théâtre, Comédie Française.

ƒ Article de Victoria Fourel

Il faut qu'une porte soit ouverte ou fermee d'Alfred de Musset - Mise en scene Laurent Delvert - Decor Philippine Ordinaire - Lumieres Nathalie Perrier - Costumes Christian Lacroix - Studio-Theatre - Comedie-Francaise - mars 2017 - avec : Jennifer Decker (La Marquise), Christian Gonon (Le Comte)

© Brigitte Enguérand

Dialogue incisif et séducteur, cette pièce moins souvent représentée de Musset se sert du cadre du salon bourgeois pour parler d’amour, de statut et de tradition. Un échange délicat et poétique autour d’une porte qui semble n’être jamais ouverte ni fermée, et qui se fermera peut-être pour de bon si on la passe.

Dans cette mise en scène, le plateau, moderne et presque nu fait une belle place à la joute verbale et à cette fameuse porte. Même si l’on aurait souhaité la voir plus centrale, plus présente, compte tenu de tout l’enjeu qu’elle représente, il y a une belle harmonie dans les lumières, les volumes, faisant du salon de la Marquise un atelier d’artiste, et de cette femme qui reçoit un personnage indépendant et sans fard. Le choix de la modernité visuelle est intéressant dans la mesure où il permet de se concentrer sur ce qui se dit et de ne pas tomber dans l’évidence du salon bourgeois daté. Ici, la pratique aristocratique surannée de la visite à la Marquise n’est pas légitimée par un décor, mais au contraire décrite comme un rite et rien de plus. Une création sonore énigmatique et les incursions mystérieuses du monde extérieur rendent cette création vaguement étrange, très romantique.

Le texte de Musset dit tant de la séduction subie par les femmes, comme un passage obligé dans une vie sociale, et la difficulté à être sincère dans un monde si policé. Il y a de nombreux allers-retours entre les personnages, leurs discours et surtout leurs déclarations, et la mise en scène tente de montrer cet élastique imaginaire qui attache l’un à l’autre. Le problème, c’est qu’il faut de la rupture, de nombreux changements de rythme et des surprises. Sinon, l’on reste dans l’échange, et même le fond ne parvient pas. Une fois que chaque attitude est installée, plus rien ne semble pouvoir arriver au spectacle. On est séduit par le travail sur le concret et le rajeunissement de la langue, mais on perd parfois le fil, conscient qu’on n’aura aucun mal à le récupérer. Les deux comédiens sont justes, mais il y a quelque chose d’un peu linéaire dans leurs voyelles trainantes, dans la rébellion hyper actuelle de la Marquise, dans l’attente d’un dénouement. Il y a de très beaux moments, et on aime voir éclore l’imprévisible, jusqu’à un très beau final plein d’inventivité et de poésie. La tendresse est alors toute neuve, naïve.

Il ne s’agit pas d’encourager à poser des idées de mise en scène à tout bout de champ, mais simplement de baliser un dialogue à deux voix, seulement ponctuée par la sonnette de la porte d’entrée, qui peine à trouver son rythme. On manque de silence, d’emballement, et que le mystère instauré par le cadre soit maintenu tout au long de l’échange. Là, on pourra vraiment profiter de ce texte engagé malgré tout, tendre à tout point de vue, très riche et poétique.

Il faut qu’une porte soit ouverte ou fermée
Texte Alfred de Musset
Mise en scène Laurent Delvert

Avec Christian Gonon et Jennifer Decker.

Du 23 mars au 7 mai 2017
Du mercredi au dimanche à 18h30.

Studio-Théâtre – Comédie Française
99 rue de Rivoli – Galerie du Carrousel du Louvre 75001 Paris
Métro Palais Royal – Musée du Louvre
Réservation 01 44 58 15 15
www.comedie-francaise.fr

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