À l'affiche, Critiques // Federigo, d’après Prosper Mérimée, adaptation et mise en scène Camille Germser, au Théâtre de la Croix-Rousse, Lyon

Federigo, d’après Prosper Mérimée, adaptation et mise en scène Camille Germser, au Théâtre de la Croix-Rousse, Lyon

Déc 17, 2018 | Commentaires fermés sur Federigo, d’après Prosper Mérimée, adaptation et mise en scène Camille Germser, au Théâtre de la Croix-Rousse, Lyon

 

© Flora Fanzutti

 

ƒƒƒ article de Victoria Fourel

 

Federigo est un joueur, un tricheur, un séducteur. Un vrai bon vieux pécheur en somme. Et il est prêt à entourlouper jusqu’à Jésus, et jusqu’à la mort même. Le héros de la nouvelle de Mérimée est à la fois un personnage de fable, de leçon de morale, de roman initiatique, se prêtant à un déchaînement de l’imagination.

L’adapter pour la scène n’est cependant pas une évidence, tant l’ensemble est bizarre. Et pourtant, il y a matière, comme le prouve cette création délirante de Camille Germser. Mais pour ce faire, il ne faut pas hésiter, il ne faut rien faire à moitié, il faut y aller vraiment, dans les effets visuels comme dans les procédés de mise en scène. Ici, les deux comédiens jouent et narrent la nouvelle, devenant à la fois récitant et acteur du texte, en ne manquant pas, bien sûr, d’y ajouter de nombreux inserts de modernité croustillante. Et Charlène Duval crée sa galerie de personnages déjantée, glamour et fantaisiste en bonne maîtresse de cérémonie. Sur scène, tout de la nouvelle sera transformé, moqué, repris à l’envers. Quitte à adapter un conte moral (ou amoral) qui joue avec les animaux, les anges, et la mort en personne, autant le faire à fond.

Et c’est là qu’un joli tour de force est assuré. On a déjà vu des spectacles qui usent du travestissement, du décor à tiroirs, des mains presque invisibles qui placent et déplacent les accessoires. Mais ici, tout est maîtrisé, et fait avec intelligence et un second degré permanent, une légèreté insolente. A tel point que c’est là que se trouve aussi le seul défaut du spectacle. Plein de digressions, d’apartés et de blagues hilarantes, on en perd parfois un peu en précision et en technique, dans l’articulation, notamment.

Federigo est une fantaisie morale, si l’on peut se permettre ce terme contradictoire, mais c’est aussi l’occasion d’une jolie réflexion sur le théâtre. On montre les ficelles de cette fantaisie, en interpellant le spectateur, en le prenant comme figurant, et à la toute fin, en lui proposant de changer de perspective. Ce spectacle a des tas de thèmes, mais ce qui lie le tout, c’est qu’il tente de nous rappeler que tout n’est jamais que de la triche, et que tout est possible. Presque.

Les comédiens sont excellents et bien dirigés, on rit beaucoup, on découvre aussi une drôle d’œuvre improbable de Prosper Mérimée. À la limite du music-hall, du théâtre hyper contemporain et du théâtre de tréteaux, c’est un moment un peu fou et vraiment jouissif, si l’on accepte de se laisser faire.

© Rémy Huart

 

Federigo, d’après Prosper Mérimée

 

Mise en scène Camille Germser

Lumières Dominique Plaideau

Scénographie Caroline Oriot

Costumes Agathe Trotignon

Avec Charlène Duval et Vincent Heden

 

Du 12 au 22 décembre 2018

Le lundi à 20h, du mardi au vendredi à 21h et le samedi à 19h30

 

Durée 1h10

 

Théâtre de la Croix-Rousse
Place Joannès Ambre

69004 Lyon

Réservation au 04 72 07 49 49

www.croix-rousse.com

 

 

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