ƒƒ article de Camille Hazard
C’est en 1961 que le metteur en scène, comédien et dramaturge allemand Manfred Karge rejoint le Berliner Ensemble. Pendant huit ans, il n’a cesse d’explorer l’œuvre de Brecht avec la troupe, comme comédien ou metteur en scène.
En 1969, il part travailler à la Volksbühne de Berlin puis au Burgtheater de Vienne. Enfin, après avoir enseigné à la Haute Ecole de Théâtre « Ernst Busch », il revient en 2002 au Berliner Ensemble, alors sous la direction de Claus Peymann.
Le requin, lui, il a des dents,
Mais Mackie a un couteau :
Le requin montre ses dents,
Mackie cache son couteau
La complainte de Mackie Mackie-le-Surineur
Prologue de L’opéra de quat’sous
A l’occasion de la venue de la troupe cet automne, Manfred Karge réunit les comédiens autour d’une revue musicale et poétique, tirée de l’œuvre de Bertolt Brecht. A travers trente-deux numéros, le public plonge dans l’univers brechtien ; un univers populaire, païen, grotesque et acerbe qui sert de cadre à l’auteur, pour manifester peur et désarroi face à une société qui se nécrose.
Ces interludes, mises en musique à leur création par Kurt Weill, Paul Dessau ou encore Hanns Eisler, font chanter les personnages de Baal, de l’Opéra de quat’sous, de Têtes rondes et têtes pointues, de La Bonne âme de Sé-Tchouan, Maître Puntila et son valet, Mère Courage et ses enfants, Le cercle de craie caucasien et bien d’autres…
Si le spectacle aurait pu se transformer en « grand déballage », en sacrosaint hommage à l’auteur disparu, on évite justement tout ornement, toute émotion grasse et sucrée. La simplicité et le dénuement sincère qui se dégagent des comédiens créent un rapport intime et familier avec le public. Le plateau du Théâtre de la Ville perd sa dimension magistrale et se transforme en délicat écrin. Assis autour d’une table désordonnée, les comédiens se lèvent, accompagnés de quatre musiciens, pour intervenir et chanter. Dénués de costumes et d’accessoires, ils font résonner les mots de Brecht ; là est l’hommage : ses mots, rien que ses mots.
Avec cette même simplicité, le comédien Alain Libolt mène la revue et précise le contexte littéraire et historique des chansons.
Ce spectacle tout en retenue dévoile une certaine intimité de la troupe du Berliner Ensemble. Nous sommes émus de voir combien le respect, l’admiration et l’amour animent encore cette troupe pour son créateur Bertolt Brecht.
Et le requin, il a des dents…
Chansons, poèmes et chœurs du théâtre de Bertolt Brecht
Conception et mise en scène Manfred Karge
Musiques Kurt Weill, Paul Dessau, Hanns Eisler
Direction musicale Tobias Schwencke
Costumes Wicke Naujock
Avec Claudia Burckhardt, Ursula Höpfner-Tabori, Manfred Karge, Karla Sengteller, Katharina Susewind, Roman Kaminski, Michael Rothmann, Martin Schneider, Veit Schubert, Jörg Thieme et Alain LiboltLe 17 et 23 septembre 2014 à 20h30
Théâtre de la Ville
4, Place du Châtelet – 75004 Paris
M° Châtelet
Réservations 01.42.74.22.77
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