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Dom Juan, de Molière, mise en scène Olivier Maurin, au TNP

Nov 27, 2019 | Commentaires fermés sur Dom Juan, de Molière, mise en scène Olivier Maurin, au TNP

 

 

© Michel Cavalca

 

 

ƒƒ Article de Victoria Fourel

Dom Juan, c’est l’impie, le séducteur, l’insatisfait. Dans ce texte aux multiples tons et aux accents d’une modernité rare, on passe d’un humour acerbe sur une époque à une tragique recherche de sens dans l’existence. Autant de facettes que tente d’explorer la mise en scène d’Olivier Maurin.

D’abord, et parce que c’est un point essentiel, cette version de l’œuvre de Molière s’attache à l’influence du théâtre de tréteaux. Chaises qui servent de décor simple, costumes sobres, changements à vue. C’est le texte qui est mis en valeur, avec pour fond une toile peinte, qui donne l’impression d’avoir été tendue comme ça, pour simplement recréer l’ambiance du dehors. Cela a son revers, et il est de taille : on perd énormément sur l’aspect visuel et magique du spectacle. La statue imposante du commandeur, les apparitions menaçantes… c’est ce versant qui nous manque.

En termes de direction d’acteurs, pour le coup, ce choix premier degré et sobre fonctionne complètement. Parfois, on tente d’expliquer à certains qu’il ne manque que le concret pour que le théâtre classique soit du théâtre tout court. Et c’est ce genre de spectacles qui illustre ce propos. La langue est rapide, incisive, l’humour est pris à bras-le-corps. On cherche le premier degré pour gommer les siècles qui nous séparent de Molière, on empêche que le parler soit trop châtié. Le genre de choix qui rend les textes accessibles.

Là encore, et comme tout choix en jeu, cela a son défaut. Si dans la première heure de spectacle, le côté enlevé, jeune, explosif, sert complètement l’humour et notamment les joutes séduisantes de Dom Juan, on sent que le passage à un registre plus froid, plus dangereux, a du mal à se faire. On sent que le spectacle est coupé en deux. Une première partie qui fait mouche, et une deuxième qui ne réussit pas tout à fait ce tournant. Il y a tout de même un moment où tout bascule, dans Dom Juan. Un moment où l’homme est en danger de mort immédiat. Puis de disgrâce. De solitude immense. Et même de châtiment divin imminent. Mais la mise en scène peine à faire sentir la gravité, la menace. Notamment à cause de sa façon de dépeindre la statue et le tombeau, qu’on imagine massif, surnaturel, dès l’entrée.

C’est tout de même un spectacle intelligemment mené, jusque dans les rapports entre Dom Juan et Sganarelle, tout à l’écoute. On y savoure la verve des uns et des autres, l’amusement de passer d’un registre à l’autre, de dire des énormités sur le ton badin. Bref, de rire des superstitieux et des impies.

C’est un spectacle que l’on conseillera à ceux qui veulent partir à la rencontre de grandes figures tout en ayant peur de les trouver figées et trop imposantes. Et une fois le spectacle terminé, on ne pourra pas s’empêcher d’être un peu déçu d’avoir perdu la folie, la grandiloquence, le spectaculaire au passage. C’était peut-être le prix à payer pour avoir l’impression que Dom Juan, Sganarelle ou Elvire nous regardent vraiment.

 

 

© Michel Cavalca

 

 

Dom Juan, texte de Molière

Mise en scène Olivier Maurin

Collaboration artistique Sandrine Sisoutham

Scénographie et Costumes Emily Cauwet-Lafont

Création lumière Nolwenn Delcamp-Risse

Création sonore et musique Antoine Richard

Avec Clémentine Allain, Fanny Chiressi, Arthur Fourcade, Héloïse Lecointre, Matthieu Loos Mickaël Pinelli Ancelin, Rémy Rauzier et Arthur Vandepoel

 

 

 

Du 13 novembre au 7 décembre 2019

Les mardis, mercredis et vendredis à 20 h 30

Les jeudis 20 h

Les samedis à 18 h 30 et les dimanches à 16 h

 

Durée 2 h environ

 

 

 

Théâtre National Populaire

8 place Lazare-Goujon

69100 Villeurbanne

 

Réservation 04 78 03 30 00

www.tnp-villeurbanne.com

 

 

 

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