© Korea National Contemporary dance Company, Mok Jinwoo

ƒƒ article de Denis Sanglard

Drôle de performer, drôle de performance qui laisse les spectateurs quelque peu pantois et dubitatifs… Jeong Seyoung, performer sud-coréen, tente de défier les lois de la gravité. L’envol étant le propre de l’illusion théâtrale, selon ses dires, son corolaire, la descente l’est donc également. Avec trois fois rien défier Newton, pari audacieux et totalement braque, est une entreprise à haut risque. Une mise en scène minimaliste mais fortement théâtralisée, musique grandiloquente pour des actions toute bêtes, avec pour leitmotiv « Someone,  Jésus, a hippie or a rocker was looking at the sky ». Cela tient du bricolage, de l’expérimentation hasardeuse mais réfléchie et du non-sens le plus absolu. Un ballon s’envole et idiot que nous sommes ne pas regarder la lune mais ces trublions, ils sont deux sur le plateau qui vont et viennent tranquilles comme Baptiste, qui pince-sans-rire, impassibles, éprouvent sans esbroufe, rien de spectaculaire c’est vrai, les mille et un moyen d’agir contre cette gravité dont Jeong Seyoung fut la victime, accidentellement perché à une barre de projecteur sans pouvoir en descendre. Image illustrée brièvement au cours de cet opus quelque peu loufoque. Tout cela n’est que du vent sommes tentés de nous dire devant ces dix ventilateurs installés brassant l’air avant d’être couchés et de faire une symphonie de cliquetis digne d’un concerto de Boulez. Ou encore cette longue observation d’une sphère qui se dégonfle comme un soufflet sans rien faire d’autre que suivre, stoïque, ce lent, très lent, mouvement aléatoire. Les objets sont ainsi allégrement détournés au service de ce propos volatile. Une barre d’exercice se métamorphose croit-on en barre d’haltérophile avant que nous rectifions cette première vision trompeuse. Cette barre devient par un glissement métaphorique et audacieux, improbable, une danseuse classique ou contemporaine pour des portés vertigineux défiant justement la gravité, la pesanteur dans un vrai et court ballet, musique classique et fumée en sus. Un brouillard qui n’est pas sans rappeler cette bouilloire qui d’emblée au commencement de cette performance laissait longuement évaporer son eau. Le titre même de cette performance est suffisamment explicite. Jeong Seyoung s’amuse ainsi à critiquer joyeusement les codes de la représentation théâtrale qui nous font prendre des vessies pour des lanternes, un dieu descendre des cintres ou sortir d’une trappe. Et dans ce mouvement ascendant ou descendant tout l’artifice absolu propre à la représentation. Tout est affaire de convention et d’imagination. De moyen. Ici d’une forte dose de dérision et de peu de chose.

Deus ex machina chorégraphie de Jeong Seyoung

Avec  Jeong Seyoung, Lee Sinsil, Seo Jaeyoung

Dramaturgie  Lee Jaemin

Création lumière  Lee Hyunkyu

26 et 27 juin 2018 à 21h

Centre National de la Danse

1 rue Victor Hugo

93007 Pantin

Réservations 01 41 83 98 98

cnd.fr

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