Critiques // « Dawnlight / Night : Light », Chorégraphie et danse Alban Richard, Atelier de Paris-Carolyn Carlson, Festival June Events

« Dawnlight / Night : Light », Chorégraphie et danse Alban Richard, Atelier de Paris-Carolyn Carlson, Festival June Events

Juin 22, 2015 | Commentaires fermés sur « Dawnlight / Night : Light », Chorégraphie et danse Alban Richard, Atelier de Paris-Carolyn Carlson, Festival June Events

ƒƒƒ article de Denis Sanglard

Night : Light Un projet d'Alban Richard, Raphaël Cendo et Valérie Sigward© Agathe Poupeney

Alban Richard, formidable danseur, est une boule d’énergie solaire insaisissable capable d’explosions fulgurantes et de retenues imprévisibles. Une danse toute de tension et de relâchement qui vous foudroie. Une danse instinctive et maîtrisée où la rigueur de la pensée autorise le chaos le plus absolu. Avec « Dawnlight/Night : Light », fusion entre musique, danse et lumière, il nous embarque dans une traversée où la danse devient transe et chamanisme. « Dawnlight », première partie, prologue, pièce musicale du compositeur Jérôme Corbier, plonge le spectateur dans un état méditatif. Oblige à une attention tendue. Dans une ombre mouvante, entre chien et loup, un corps presque nu se meut. Peu de mouvement, peu de déplacement, ou les mêmes répétés, lancinants et mystérieux. Ils semblent jaillir de loin, très loin, du fond des âges. L’impression diffuse d’une danse originelle, archaïque, un rituel chamanique primal qu’un faune massif et perdu danse au fond d’une grotte. Le temps n’est plus. Etrange performance qui nous projette dans un stupéfiant ailleurs où la lumière, la musique et la danse sont en fusion, comme hybridées, et dilatent l’espace et le temps. Expérience troublante et fantastique. Alban Richard lui-même semble absorbé dans cet espace létal, lui-même poreux et suspendu, flottant dans cet entre-deux qui déstabilise le spectateur projeté sur la scène par le dispositif quadrifrontal adopté et la géode acoustique, formidable invention, qui transforme la scène en vaste conque auditive et brouille tous les repères sonores qui semblent sourdre de partout et saturer l’espace. Lequel atteint une densité hors du commun que les lumières crépusculaires aux variations sensibles de Valérie Sigward renforcent. Le résultat est bluffant qui n’occulte pas la danse mais l’intègre dans un projet plus global où chacune des parties en osmose plus qu’en équilibre entrent formidablement en résonnance. Mais ce prélude n’est qu’un sas. Une mise en condition. Dans la seconde partie, « Night : Light » cette expérience atteint son apogée. L’ensemble Cairn, isolé derrière une vitre, interprète les pièces musicales de Raphaël Cendo. Les lumières de Valérie Sigward explorent toute la gamme chromatique qui précède la lumière blanche, découpent le plateau qu’elles font voler bientôt en éclat. Poussières de lumière ou éclats tranchants, le plateau est absorbé, liquidé, balayé. Et Alban Richard quarante-cinq minutes durant explore le mouvement, le pousse à saturation, entre déflagration et abattement tendu. Une danse dynamique, énergique autour des textes de Leaves of Grass de Walt Whitman qu’il articule en arpentant le plateau. Paroles retravaillées, mixées en direct par le laboratoire du CNAM présent également. Une danse expressionniste tant le mouvement, le geste même dans son abstraction est porté, amené à saturation, à l’incandescence jusque dans ses extrémités, visage compris. C’est d’une fulgurance inouïe. Le résultat est explosif. Nous-même sommes définitivement perdus, hors du temps, sans plus aucun repère autre que cet objet artistique hors du commun qui dilate l’atmosphère, joue des oppositions, des contrastes et de la fusion des différentes parties qui bousculent nos certitudes, bientôt écroulées. Nous sommes à cran, les sens exacerbés, à vif, l’émotion à fleur de peau, saturés par cette densité laquelle nous broie, pris dans un étau émotionnel qui ne lâche pas prise devant cette danse de damné, devant ce danseur que rien ne semble pouvoir arrêter.

Dawnlight/Night : Light
Chorégraphie et interprétation Alban Richard
Dawn Light,création musicale de Jérôme Combier
Night : Light,création musicale de Raphaël Sando
Texte extrait de Leaves of Grass (1855) de Walt Whitman
Création lumières Valérie Sigward
Création Costumes Corine Petitpierre
Réalisation informatique musicale Ircam
Olivier Pasquier (Night : Light) et Robin Meier (Dawnlight)
Régie informatique musicale IRCAM José-Miguel Fernandez
Ingénieur du son Ircam Serge Lacourt
Assistante chorégraphique Martha Moore
Conseillère en analyse fonctionnelle du corps pour le mouvement dansé Nathalie Schulman
Interprétation Ensemble Cairn (Cédric Jullion, Saori Furukawa, Frédéric Baldassare, Caroline Cren)

19 juin 2015 à 19h30

Atelier de Paris-Carolyn Carlson / Festival June Events
Cartoucherie de Vincennes
Route du champ de manœuvre – 75012 Paris
Réservations 01 417 417 10
www.junevents.fr

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