À l'affiche, Critiques // D’autres vies que la mienne, d’Emmanuel Carrère au Théâtre de la Reine Blanche

D’autres vies que la mienne, d’Emmanuel Carrère au Théâtre de la Reine Blanche

Jan 10, 2017 | Commentaires fermés sur D’autres vies que la mienne, d’Emmanuel Carrère au Théâtre de la Reine Blanche

ƒƒ article de Denis Sanglard


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Sobriété, il n’en fallait pas plus pour adapter à la scène le récit d’Emmanuel Carrère « D’Autres vies que la mienne ». Récit poignant d’une infinie douceur, d’une légère tristesse mais d’un formidable élan d’amour et d’humanité pour conter la perte d’un enfant et celle d’une jeune femme, mère de trois fillettes. 2004, un tsunami dévaste les côtes du Sri Lanka où séjournent l’écrivain et sa compagne Hélène et leurs deux enfants, Jean-Baptiste et Rodrigue. Une autre famille avec laquelle ils se lient d’amitié est dévastée par la mort de leur fille, Juliette emportée par les flots. Emmanuel Carrère raconte avec grande délicatesse et empathie,  l’impact brutal du drame. A Paris, au retour, autre tragédie. La mort de sa belle-sœur Juliette. Récit d’une agonie et là aussi l’impact sur la famille. C’est aussi la rencontre d’un homme exceptionnel, Etienne, juge et collègue de Juliette au tribunal d’instance de Vienne qui va révéler un aspect inattendu de la défunte et ce qui les liait tous deux. Cet homme-là Emmanuel Carrère en fait le pivot de son récit. Rescapé d’un cancer qui la laissé unijambiste, il mène un combat contre les établissements de crédit et le surendettement des familles. Combat qu’il menait avec Juliette. Et puis il y a Patrice, le mari de Juliette qui se confie à l’écrivain sur les derniers jours de sa femme et sur son couple confronté à l’inéluctable. Histoire de mort, de deuil, de résilience. David Nathanson adapte pour la scène ce récit, en fait un matériau théâtral sans heureusement verser dans le démonstratif, le pathos qu’un texte aussi délicat et chargé d’émotion pourrait offrir comme chausse-trappe. Fidèle au texte et lui faisant une absolue confiance il offre la mise en scène à Tatiana Werner. Ils restent tous deux au plus près du texte, de sa dimension avant tout littéraire. La force du récit n’en demande pas plus. Certes quelques effets inutiles auraient pu être évités qui n’apportent pas grand-chose. Comme ce visage soudain tâché de sang. C’est un récit et en cela il se suffit à lui-même, inutile d’en rajouter. Mais la conviction de David Nathanson qui n’est jamais aussi juste que dans une certaine neutralité, ne cherchant jamais à jouer, à s’imposer par rapport au récit, s’effaçant derrière celui-ci, volontairement dans l’esquisse pour souligner les acteurs de cette histoire, l’emporte très vite et fait oublier ces quelques tics, sans gravité, de mise en scène. C’est dans la plus grande sobriété que le texte s’offre à nous, que l’écriture d’Emmanuel Carrère se dévoile…

D’autres vies que la mienne d’après Emmanuel Carrère
Adaptation Tatiana Werner et David Nathanson
Mise en scène Tatiana Werner
Avec David Nathanson
Lumière et vidéo Mathieu Courtaillier

Du 4 janvier au 11 février 2017
Du mardi au samedi à 20h45
Relâche les 14, 25 et 26 janvier

Théâtre de la Reine Blanche
2bis passage Ruelle
75018 Paris
Réservations 01 40 05 06 96
reservation@reineblanche.com

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