Critiques // « D’après une histoire vraie », chorégraphie de Christian Rizzo, au 104

« D’après une histoire vraie », chorégraphie de Christian Rizzo, au 104

Avr 28, 2015 | Commentaires fermés sur « D’après une histoire vraie », chorégraphie de Christian Rizzo, au 104

ƒƒ  article de Florent Mirandole

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Le temps est couvert sur le théâtre du 104. Sur les planches de la nef Curial passent les ombres de petits cumulus. C’est dans cette lumière pâle et blême que s’élancent les 8 danseurs de la pièce de Christian Rizzo. Vêtus de jeans et de chemise bleue, ils sont dans le ton. Seuls, à terre, chacun se débat lentement. Puis ce parterre de pantins indolents s’anime progressivement alors qu’une lumière plus chaude, plus méditerranéenne, commence à colorer la scène. Les corps se redressent et se réunissent, puis se soutiennent et s’épaulent pour finir par danser ensemble. La pièce prend alors des accents plus classiques. Nous ne sommes pas encore devant une version moderne de la sarabande, mais la légèreté et la préciosité des déplacements rompent avec l’esthétique traditionnelle de Christian Rizzo, passé maître dans l’art du clair obscur et de l’épure conceptuelle.

Cette touche de soleil vient du souvenir insistant que Christian Rizzo a gardé d’une danse turque vue il y a plusieurs années. Cette influence apporte cette danse forte et décomplexée, ainsi qu’un peu de désordre collectif. Les corps en particulier n’ont jamais été aussi libres chez le chorégraphe qu’avec ce spectacle. Ils courent, bondissent, et glissent avec insouciance. Cette influence crée alors des scènes particulièrement inventives, comme lorsque les bras des danseurs se croisent et s’emmêlent sans jamais se lâcher, créant des mouvements collectifs particulièrement virtuoses.

L’émulation collective ne dure toutefois jamais très longtemps dans « D’après une histoire vraie ». Si l’apport oriental permet de travailler sur le groupe, le spectacle est d’abord construit autour du thème de l’union et de la dislocation. Les allers-retours constants entre le collectif et l’individu sont l’occasion de multiplier les ruptures, musicales, esthétiques et chorégraphiques, traduisant aussi la violence qui peut germer du collectif. L’image du groupe réuni qui expulse un à un les danseurs, dont les corps restent alors au sol, inertes, fait à cet égard froid dans le dos. Ces ruptures sont d’ailleurs scandées en live par les percutions entêtantes des deux batteurs, qui instillent à chaque scène une part de brutalité ou de tension.

Le chorégraphe n’a pas rompu avec son esthétique en intégrant cette danse orientale joyeuse et insouciante. Plutôt, Christian Rizzo a voulu créer de nouvelles formes à partir de la rencontre de deux styles chorégraphiques en tout point opposés. Si quelques scènes demeurent trop légères, comme lorsque la petite troupe semble badiner au gré du vent, ce spectacle hybride n’en reste pas moins envoutant. On comprend pourquoi son succès en 2013 au festival d’Avignon se prolonge encore aujourd’hui.

« D’après une histoire vraie »
Conception, chorégraphie, 
scénographie et costumes : Christian Rizzo
Musique originale et interprétation :
Didier Ambact et King Q4
Lumières : Caty Olive
Régie générale : Jérôme Masson
Arrangements sonores : Vanessa Court
Régie lumière et vidéo :
Arnaud Lavisse et Samuel Dosière
Avec Fabien Almakiewicz, Yaïr Barelli, Massimo Fusco, Miguel Garcia Llorens, Pep Garrigues, Kerem Gelebek, Filipe Lourenço, Roberto Martínez

Du 25 au 27 avril 2015

Le Centquatre
5, rue Curial – 75009 Paris
M° Riquet
Réservation 01 53 35 50 00
www.104.fr

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