Critiques // Critique • « Roméo et Juliette », tragédie en chantier de Shakespeare, mise en scène de Luca Franceschi

Critique • « Roméo et Juliette », tragédie en chantier de Shakespeare, mise en scène de Luca Franceschi

Juin 14, 2012 | Aucun commentaire sur Critique • « Roméo et Juliette », tragédie en chantier de Shakespeare, mise en scène de Luca Franceschi

Critique de Rachelle Dhéry

© Anne-Lise Ourmières

Étirements, échauffements, bavardages, les acteurs de la Compagnia dell improvviso accueillent le public sans vraiment s’y intéresser. En tenues urbaines, sur un plateau nu où seul un rideau est ouvert sur des « coulisses », laissant apparaître un portant à costumes, une table à l’avant-scène, une rampe de lumières, des tréteaux, un masque de commedia qui traîne dans un coin (oui, oui, nous sommes bien dans l’univers de la Commedia Dell’Arte, pour ceux qui n’auraient pas suivi) et quelques tabourets disposés çà-et-là, on s’interroge. Allons-nous assister à un spectacle ? Ou à une répétition ? Ils nous regardent parfois, solennels, avec une pointe d’attente dans le regard. Serions-nous en retard ? Puis, quand tout le public semble installé, ils se posent en demi-cercle, sur leurs tabourets. Soudain, Luca Franceschi nous observe et finit par nous demander : « Êtes-vous encore sensibles à cette passionnante histoire d’amour ?  Votre cœur est-il capable d’éprouver de légères palpitations ? N’est-il pas endormi, offusqué par vos préoccupations, agité par vos tracas du quotidien, blessé par vos mésaventures ? »

Voilà. Tout est dit. Cette histoire antique est popularisée par William Shakespeare en 1597. Roméo aime Juliette qui aime Roméo, mais leurs deux familles, les Montaigu et les Capulet, se vouent une haine mutuelle. En secret, ils parviennent à se marier, grâce au frère Laurent. Et tout près de leur bonheur éternel, ils sont rattrapés par l’inéluctable Mort, quand Tybalt tue Mercutio lors d’un combat empli de haine. Et Roméo, pour venger son ami, tue à son tour Tybalt, avant d’être banni de Vérone. Et du crime à la tragédie, il n’y a qu’un pas. Malgré un stratagème complexe pour réunir nos deux tourtereaux, la Mort sera leur seule issue. Une Mort cruelle, lente et stupide. Et de leur sang naîtra enfin la réconciliation des deux familles ennemies. L’histoire de Roméo et Juliette, 1000 fois jouée, vue et revue, au théâtre, en chanson, au cinéma… Sobrement ou à l’aide de grands décors, en costumes d’époques ou modernes… La tragédie la plus célèbre de Shakespeare peut-elle encore nous toucher ? Le défi est lancé. Nous allons bien voir.

« Je verrai à l’aimer, s’il suffit de voir pour aimer. »

Et nous avons vu. Et nous avons aimé. L’illusion était à nouveau exquise. Des tabourets en guise de décors, des costumes efficaces et souvent très drôles, quelques musiques malicieuses, quelques chants harmonieux, des combats à l’épée haletants, une parfaite maitrise du rythme et des enchaînements, sans aucun temps mort, des petites surprises qu’il vaut mieux taire, mais surtout, oui surtout, des comédiens extrêmement investis et incroyablement bons. Attachante, vraie, juste, comique, tragique, toute la joyeuse troupe sait nous happer dans les méandres de ces amours maintes fois éprouvées, sans jamais nous lâcher, en nous touchant au plus près.

Roméo et Juliette, tragédie en chantier
Création festival Molière à Versailles / Festival Avignon 2012
D’après l’œuvre de William Shakespeare

Adaptation et mise en scène : Luca Francheschi
Avec Eglantine Jouve, Nathalie Robert, Nicolas Violin, Angelo Crotti, Jean-Serge Dunet, Serge Ayala, Luca Franceschi
Costumes  Sûan Czepczynski
Décors  Stefano Perocco
Musique Trio Zéphir

Du 9 au 10 juin 2012

Festival Mois Molière
Grandes Ecuries de Versailles

http://www.moismoliere.com

www.improvviso.org

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