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Tout semblait immobile, de Nathalie Béasse, au Théâtre de la Bastille

Mai 16, 2019 | Aucun commentaire sur Tout semblait immobile, de Nathalie Béasse, au Théâtre de la Bastille

© Nathalie Béasse

 

ƒ Critique Djalila Dechache

Nathalie Béasse a du talent. Ses comédiens aussi. Et il faut le dire. Son spectacle, actuellement au théâtre de la Bastille – elle y est invitée pour la troisième fois –, est une tranche d’air frais. Au début… parce qu’après cela se gâte.

Trois conférenciers spécialisés dans la « psychanalyse des contes de fées », de la « morphologie du conte », livres de Bruno Bethelheim et de Vladimir Propp, posés en trophées sur la table, rencontrent le public.

 « Il était une fois, il y avait une fois… »

Déboulant dans le public sans que l’on sache que ce sont les comédiens, ils semblent attendre quelqu’un ou quelque chose. La femme tient un gobelet de café à la main tandis que l’homme, au demeurant austère et droit comme un i, se contente de sa serviette de cuir. Ils sont venus en TGV ; elle déplore la nourriture du réseau ferroviaire, mi-amusée, mi-désolée, et se jette sur un spéculos qu’elle trempe et avale avidement dans son café.

Ils sont tout d’abord deux, Janine Jacquard (remarquable Camille Trophème) et Jean-Pierre Von…… quelque chose (pour les noms danois il faut un peu d’expérience !). Leur entrée puis leur installation en vérifiant les micros et leur présentation est magnifique de justesse et de vérité. L’une présente l’autre et l’on se perd dans les titres, la liste des universités et des chaires où ils officient, si longs, si bavards. Nous sommes dans le monde merveilleux de l’intellectualisme et des savants.

Ils parlent, ils parlent lorsqu’arrive le troisième larron, Joël Noyeux, avec son sac de voyage et portant lunettes, il s’est un peu perdu en chemin. Mimiques, attitudes, controverses sur des points de détails, débit de paroles, ils vont bien vite tomber dans la cacophonie et les divergences. Jusqu’à ce que des objets du quotidien tombent,  j’allais dire, du ciel.

 C’est là que le spectacle bascule dans ce que pourraient être des réminiscences, des peurs enfouies ou encore des visions de conte de fées avec la jolie princesse musicienne et sa voix enchanteresse.

Comme son « travail est lié au conte depuis des années » et qu’elle veut « perturber les codes de la narration » pour ce spectacle, Nathalie Béasse a travaillé sur des thèmes précis tels que ceux rencontrés dans Le Petit Poucet et Hansel et Gretel, évoquant les  rites de passage, de séparation, le départ dans la forêt profonde.

 « Ich habe meine mama… ».

Ils usent de bruitages, déguisements, chants en plusieurs langues comme la mémorable « Ich habe meine mama… », et toujours des objets qui chutent et sont transformés par la main de l’humain. Il faut ajouter qu’il y a beaucoup de drôlerie et d’humour dans ce spectacle. Quand Janine utilise le buste nu de son comparse pour matérialiser les creux et les pleins d’un conte, c’est à mourir de rire, parce que c’est bien vu et juste. Tous deux se prêtent à la démonstration « scientifique » avec beaucoup de sérieux et de conviction.

La peur du noir est intelligemment amenée avec une  panne d’électricité intégrée au jeu, à un moment donné durant le spectacle : Janine occupe « le terrain » en interpellant la régie, trouve une solution de fortune avec son briquet, la peur gagne, elle pense à une blague de ses collègues masculins, le ton change et devient moins aimable jusqu’à ce que la lumière reprenne enfin sa place.

À la fin, le plateau est comme un champ de bataille de fin de monde, ils quittent la scène défaits ; Janine part, elle, en s’excusant.

 

© Nathalie Béasse

 

Tout semblait immobile, de Nathalie Béasse

Lumières Nathalie Gallard,

Musique Camille Trophème,

Construction Décors Etienne Baillou

Peinture Julien Parsy

Avec Camille Trophème, Etienne Fague, Erik Gerken

 

17, 18 mai puis du 23 au 25 mai 2019 à 18h30

Durée, 1 heure environ

 

Théâtre de la Bastille 
76 rue de la Roquette
75011 Paris

 

Réservations : 01 43 57 42 14
www.theatre-bastille.fr

Métro : Bastille

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