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Critique. « On a fait tout ce qu’on a pu » de et avec Philippe Fenwick au Théâtre 13

Avr 05, 2013 | Aucun commentaire sur Critique. « On a fait tout ce qu’on a pu » de et avec Philippe Fenwick au Théâtre 13

ƒ Critique Anna Grahm

  philippe_fenwick© DR

« Quand un artiste sait où il va, il vaut mieux ne pas y aller » Tarkovski

Il y a un bout de chacun de nous dans ce spectacle. Des projets que l’on rêve, des rêves qui restent éternellement des projets. Il y a du Kafka dans l’univers que traverse Philippe Fenwick. Des étoiles plein les yeux, ce garçon va frapper aux portes des institutions pour faire financer son fabuleux projet. Il ambitionne une tournée qui va de Brest à Vladivostok. Mais on peut avoir 10 idées par seconde, un talent à couper le souffle et une petite amie prête à partager vos illusions, les bureaux des institutions tiennent à rester introuvables. Et la course aux dossiers de subvention est un parcours d’obstacles, un labyrinthe où, à tous les coups, on se casse le nez. C’est avec une volonté tenace et cocasse que notre homme va se battre pour que son projet ait une chance de voir le jour. Mais la volonté administrative, tout aussi butée, va l’empêcher d’avancer; l’administration est insaisissable, comme de l’eau qui vous glisse entre les doigts.

Aussi l’artiste questionne. Comment réduire le budget, comment trouver ailleurs des sponsors, comment continuer ? On sourit à l’idée qu’il ait pu, qu’il pourrait, aller chercher des subsides en Russie ! On sourit et on s’amuse d’ailleurs énormément de ses échecs répétés, de ces « on vous rappellera » désespérants, qui font demander à l’acteur citoyen : « comment vivre dans un pays contemporain? »

Est-ce ainsi que les artistes survivent ?

Dans ce spectacle, il y a des bouts de nos vies. L’inconscient, la grand-mère, le sentiment d’être éreinté. Il émane, du petit film de famille, toute la tendresse du monde. Car Philippe Fenwick est un poète qui jamais ne s’appesantit sur le découragement, non, vaille que vaille, de fiche de renseignements en équipement Mac, il s’obstine contre l’inertie. L’artiste reste gracieux, aérien, subtil, il envahit l’espace. Accompagné par son disc jockey, soutenu par une fée acrobate, fil de ferriste, funambule, l’artiste demeure inébranlable, il guerroie. Malgré les doutes, l’auteur, acteur, metteur en scène poursuit son action et fait tout ce qu’il peut « pour rentrer dans les cases ».

Mais est-ce bien là l’utopie : devenir un artiste d’état ? Sur son chemin de Damas, il rencontre toutes les mauvaises raisons de ne pas faire les choses, il croise un cochon très bien élevé, il se convertit au cauchemar conformiste qu’il a pourtant combattu d’arrache-pied. Il voulait se lancer dans une immense aventure théâtrale, convaincre des partenaires, persuader l’institution de le soutenir. Il est de la « génération Casimir, malbouffe, chômage et sida, de la génération victime des crises », il s’appelle Fenwick « comme la marque de chariot élévateur », il mélange habilement réalité et fiction, c’est un étourdissant contem-Forain.

 

On a fait ce qu’on a pu
Une épopée de Philippe Fenwick
Avec : Philippe Fenwick, Sarah-Louise Schwarz (funambule)
Création musicale : Frédéric Duzan

Mardi jeudi samedi à 19h30
Mercredi vendredi à 20h30
Dimanche à 15h30

Théâtre 13
30 Rue du chevaleret
75013 Paris
métro 14 et RER C arrêt bibliothèque F. Mitterrand
Réservation 01 45 88 62 22
www.theatre13.com

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