ƒƒƒ  Critique Suzanne Teïbi

© Anne Nordmann

L’assemblée théâtrale

Pourquoi faire encore du théâtre ? Pourquoi allons-nous au théâtre à l’ère de l’immédiateté et de l’ultra technologique?  Si l’ambition des Sans Cou est de répondre à cette question par la création collective J’ai couru comme dans un rêve, quel défi ! Il est relevé avec beaucoup de justesse.

En invitant le public à participer activement à la représentation, le ton est donné. Et c’est la grande force de ce spectacle, qui ne laisse pas indifférent, et qui fait du public une véritable assemblée théâtrale. Dans un jeu d’allers et retours entre la fable et le temps concret de la représentation, Les Sans Cou posent la question de l’ici et maintenant, qui habite tant la fonction du théâtre que la fable même.

Martin est atteint d’une tumeur foudroyante, il apprend qu’il va mourir du jour au lendemain. Comment vivre pleinement ces derniers moments ? Il sera entouré de ses proches, et accompagné par le spectateur. Pendant ces 2h30, le drame rencontre le grotesque, et l’humour  permet d’échapper au risque du pathos. C’est un théâtre de son temps, qui jongle avec les références des années 80 et 90 autant qu’avec le présent. Un spectacle qui nous concerne parce qu’il parle de nous au fond, et du monde dans lequel on vit, tout en nous rappelant que Shakespeare posait déjà ces questions, ou en ne résistant pas à jouer avec Feydeau.

Vivants

En parlant de la mort, J’ai couru comme dans un rêve ne parle que de la vie, dans un sursaut de conscience. Le public vit une expérience collective qui rassemble toutes les générations. Au-delà de la justesse des comédiens et d’une grande créativité, c’est surtout ce sentiment d’avoir traversé quelque chose ensemble qui fait de cette pièce un moment de théâtre vertigineux et très émouvant.

Le théâtre est un art vivant, qui ne peut pas rivaliser avec internet ou la télévision, mais qui permet à des individus de se rencontrer le temps d’une représentation. Tout pourrait y arriver, l’ennui comme l’excitation, l’indifférence comme l’addiction. C’est une plongée dans l’inattendu que Les Sans Cou transforment en vrai rendez-vous avec leur très généreuse proposition.

J’ai couru comme dans un rêve
Création collective : Les Sans Cou
Mise en scène : Igor Mendjisky
Scénographie : Claire Massard
Costumes : May Katrem
Lumière : Thibault Joulié
Chorégraphie : Esther van den Driessche
Avec : Eléonore Joncquez-Simon en alternance avec Camille Cottin, Esther van den Driessche, Clément Aubert, Romain Cottard, Paul Jeanson, Arnaud Pfeiffer, Frederic van den Driessche

Jusqu’ au 27 avril 2013  – Lundi, mercredi, jeudi, vendredi à 19h30 – samedi à 18h – dimanche à 16h

Théâtre Gérard Philipe – CDN
59, boulevard Jules Guesde – 93200 Saint-Denis
Métro Basilique de Saint-Denis / RER D Saint-Denis
Réservations : 01 48 13 70 00

www.theatregerardphilipe.com

 

Be Sociable, Share!

•