Critiques // Critique • « Die gelbe Tapete » de Katie Mitchell au Théâtre de l’Odéon – Ateliers Berthier

Critique • « Die gelbe Tapete » de Katie Mitchell au Théâtre de l’Odéon – Ateliers Berthier

Sep 23, 2013 | Aucun commentaire sur Critique • « Die gelbe Tapete » de Katie Mitchell au Théâtre de l’Odéon – Ateliers Berthier

ƒƒ critique Dominika Waszkiewicz

 gelbe_tapete-1 © Stephen Cummiskey

Supportant mal sa récente maternité, Anna s’enferme dans une folie qu’elle va nourrir graduellement avec les absurdes motifs jaunes de la tapisserie de sa chambre. Adaptée d’un roman de la fin du XIXe siècle, la pièce nous fait assister au morcellement d’un être dans un registre fantastique.

 

Rendre compte de l’insaisissable

Grâce à un dispositif scénique complexe, Katie Mitchell lie jeu en direct et projection filmique. Les comédiens évoluent au milieu d’un impressionnant déploiement de câbles et de cameramen qui se déplacent à un rythme effréné, étourdissant. Tout semble tourner autour d’une protagoniste (la troublante Judith Engel) insondable dans son mutisme. Apathique, insomniaque, le visage hermétique et les yeux fixes, Anna parait fantomatique, absente. Seule sa pensée nous parvient mais par le biais d’une autre voix, celle d’Ursina Lardi, campée devant un micro dans une cabine insonorisée. Une pensée pour le coup volubile, prisonnière d’un corps, frêle oiseau dans sa cage jaune.

On est parfois un peu gêné par l’activité incessante sur le plateau, qui nous empêche de tout voir, de tout englober et nous pousse à nous rabattre sur l’écran suspendu. Frustré, on se retrouve avec des bribes, plus ou moins conséquentes selon le siège que l’on occupe dans la salle. Mais ce morcellement révèle son intérêt face au sujet traité et accentue le sentiment latent d’incompréhension. Comment cette femme a-t-elle pu en arriver là ? Pourquoi ne supporte-t-elle ni de voir ni d’entendre son bébé ? Est-ce un effet de la révolution hormonale qu’elle a subie en devenant mère ? Christoph (Tilman Strauẞ), son mari, semble pourtant être aux petits soins… La nourrice, Tania (Iris Becher), paraît elle aussi bienveillante… Qu’a-t-il bien pu arriver pour la déconnecter aussi totalement ? Et cette « femme derrière le papier peint », interprétée par Luise Wolfram et qu’Anna cherche à tout prix à libérer des volutes ocre, qu’est-elle ? Une projection de l’esprit malade d’Anna ? Un fantôme ?

À travers un travail extrêmement précis et rigoureux, Katie Mitchell et son équipe parviennent à faire émerger l’insaisissable et l’incompréhensible. En faisant cohabiter sur scène deux dimensions, celle des comédiens et celle des cameramen, ils permettent une abolition plus large des frontières et nous laissent assez désorientés, comme on peut l’être face à l’inexplicable folie.

 

Die gelbe Tapete (Le Papier peint jaune)
D’après Charlotte Perkins Gilman
Mise en scène: Katie Mitchell
Version anglaise de : Lyndsey Turner
Traduction en allemand : Gerhild Steinbuch
Scénographie : Giles Cadle
Costumes : Helen Lovett Johnson
Cinéaste : Grant Gee
Vidéo : Jonathon Lyle
Musique : Paul Clarke
Création son : Gareth Fry, Melanie Wilson
Lumières : Jack Knowles
Bruitages : Ruth Sullivan
Dramaturgie : Maja Zade
Traduction des surtitrages : Céline Coriat
Surtitrages : David Mass (KITA)
Et l’équipe technique de l’Odéon
Avec : Judith Engel, Ursina Lardi, Tilman Strauẞ, Iris Becher, Luise Wolfram, Cathlen Gawlich (bruitages synchronisés), Jesse Mazuch et Maurice Wilkerling (caméras)

Du 20 au 26 septembre 2013
Tous les jours à 20h sauf le dimanche à 15h
Relâche le lundi
Durée : 1h20

 
Théâtre de l’Odéon
Ateliers Berthier
1, rue André Suares, Paris 17e
Tél : 01.44.85.40.40
www.theatre-odeon.eu

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