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Critique • « Quand m’embrasseras-tu ? » de Mahmoud Darwich. Mise en scène Claude Brozzoni

Mai 23, 2012 | Aucun commentaire sur Critique • « Quand m’embrasseras-tu ? » de Mahmoud Darwich. Mise en scène Claude Brozzoni

Critique de Camille Hazard

« …Patrie, guerre, les nouvelles, les réfugiés, l’armée, les frontières, les exils…

Avec ces mots, je découvrais une réalité nouvelle, celle qui me priverait à jamais de

MON ENFANCE »

Ainsi résonnent les mots de l’auteur et poète palestinien, M. Darwich, peints sur un grand et triste mur : la fin de son enfance, de son innocence.
1948 : sa famille fuit la Palestine pour trouver refuge au Liban. Traumatisme, enfance disparue à jamais.
Sur scène, tapis, tissus, vêtements, chaussures jonchent le sol et entourent chaleureusement des instruments de musique. La scène est vide pourtant on pressent une vie passée, des gens sur le départ.  De ces étoles, de ces foulards, de toutes ces couleurs, jaillissent des empreintes, des bribes d’existence, des traces de rêves et d’espoirs… puis la précipitation et la fuite, métaphore de la Nakba.
Deux musiciens, un comédien-chanteur et un plasticien se partagent cette composition poétique et rageuse.
Au fil des poèmes et des musiques, la peinture fait vivre sur le mur, la Palestine.  La Palestine, belle, forte, sauvage, rebelle, imprégnée de ses maux mais surtout de son envie de vivre. Des dessins abstraits au pinceau,  parfois à peine des contours en perpétuel devenir, cherchent à se transformer pour ne jamais se figer, ne jamais disparaître.
L’initiative de mêler les arts pour mieux faire entendre les mots de Mahmoud Darwich  (musique, théâtre, peinture, danse quand le peintre se fond dans le rythme des percussions) montre l’envie pressante et prenante de plonger tout entier dans ce pays qui ne cesse de s’émietter. Un branle bas de combat artistique pour tenter de faire revivre cette terre devant nous.
Abdelwaheb Sefsaf, comédien impassible,  enracine les mots de Darwich; chaque mot, chaque sonorité, chaque image, nous sont envoyés avec fougue.
Quand m’embrasseras-tu ?  – et pourquoi pas  –  Quand nous embrasserons-nous ?
?

©Marc Limousin

Ce spectacle ne manque ni de finesse, ni de poigne, ni de poésie, ni d’engagement. C’est un spectacle complet, simple, servi avec un grand cœur.

Mais malheureusement un cœur qui ne bat pas pour tous… Et si nous, spectateurs parisiens, sommes émus d’assister à une telle rage pour faire résonner la voix des plus « faibles », nous le sommes moins de voir à quel point les mots et la poésie de Darwich, servent de réquisitoire contre Israël L’ENNEMI !
Car il s’agit bien d’un spectacle en la gloire de la Palestine et contre les juifs d’Israël. La poésie de Darwich, enivrante, devient le sous texte d’une inquisition.
Le peintre habille trois silhouettes d’hommes de rayures bleues et blanches; tenue évocatrice de prisonniers, nous n’osons penser qu’il pourrait s’agir d’une éventuelle comparaison avec les prisonniers juifs dans les camps de concentration pendant la shoah ! Non nous ne voulons pas le croire et pourtant l’image est là, dessinée.
Un épisode quotidien nous est relaté par le comédien (s’agit-il vraiment des mots de Darwich ?): Un chauffeur de taxi israélien dit à son passager que les arabes puent. Lorsqu’il s’aperçoit que ce passager est arabe et pire musulman, il bafouille, n’assume pas ces propos, cherche à se défiler…
Quelques instants plus tard, un conte pour enfant (ou pour antisioniste). L’ennemi Israël est considéré comme la femelle d’un moustique qui ne vient que pour sucer le sang de sa victime et qu’il faut écraser d’un coup de chaussure. On tente bien de l’achever mais la perfide se cache dans un coin, tapie et attend son heure…
Nous n’allons pas tout relater, il n’y aurait aucun intérêt de rapporter ces paroles enivrées de la soif d’en découdre.

Ce spectacle sous des airs de liberté et d’humanité, détruit les propos et l’idéal de Darwich qui, loin de victimiser le peuple de Palestine et loin de stigmatiser le peuple d’Israël, rêvait avant tout de paix, de partage, de fraternité entre juifs et arabes.

« Il n’existe pas chez moi de vision unique et définitive de l’Autre. Celui qui m’a éduqué était juif, celui qui m’a persécuté l’était aussi. La femme qui m’aima était juive, celle qui me détestait l’était aussi ».
M. Darwich – La Palestine comme métaphore.

Ce spectacle n’aura peut être pas trop d’influences néfastes tant qu’il se déroule à la maison des métallos entre gens convenus et éclairés. Mais quand serait-il si la compagnie Brozzoni prenait l’initiative de présenter cette vision manichéenne du conflit en banlieue de Paris, dans des villes, des quartiers où la population mérite bien plus de s’ouvrir à la tolérance et à l’espoir plutôt que de conforter certains esprits belliqueux…

Quand m’embrasseras-tu ?
Texte Mahmoud Darwich
Mise en scène Claude Brozzoni
Avec  Abdelwaheb Sefsaf, comédien, Georges Baux, Claude Gomez, musiciens, Thierry Xavier plasticien
Composition musicale de Georges Baux, Claude Gomez, Abdelwaheb Sefsaf
Scénographie de Claude Brozzoni, Thierry Xavier
Son de Titou Victor
Lumière de Didier Beauvarlet
Costumes de Pascal Robin

Du 22 mai au 23 juin 2012
Du mardi au vendredi à 20h, le samedi à 19h, le dimanche à 16h, relâche le lundi

La maison des métallos
94, rue Jean-Pierre Timbaud – 75011 Paris
Métro Couronnes
Réservation 01 48 05 88 27
www.maisondesmetallos.org

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