Critiques // Critique ・ « Wunderkammer Soap ≠ 1 Didon – 2 Faust » Ricci/Forte au Théâtre de Vanves

Critique ・ « Wunderkammer Soap ≠ 1 Didon – 2 Faust » Ricci/Forte au Théâtre de Vanves

Jan 29, 2014 | Aucun commentaire sur Critique ・ « Wunderkammer Soap ≠ 1 Didon – 2 Faust » Ricci/Forte au Théâtre de Vanves

ƒƒ Critique Camille Hazard

 

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©DR

Invitée à la fin de l’année à la MC93, pour jouer leur avant-dernier spectacle Imitation of Death, la compagnie italienne Ricci/forte revient en France et ouvre le bal de la 16ème édition du Festival Artdanthé au Théâtre de Vanves.

C’est ainsi qu’on a pu assister au spectacle Grimmless vendredi dernier et à Wunderkammer Soap hier soir ; deux performances Didon et Faust, pour deux comédiens, Giuseppe Sartori et Piersten Leirom. Bien que programmée une seule soirée, il était impossible de passer à côté de cette compagnie et de ne pas parler de leur travail.

On peut pénétrer l’univers artistique des Ricci/forte par une multitude d’entrées, tant leurs créations sont riches. Un magma de formes artistiques se côtoient pour former un théâtre total, un théâtre qui ne ménage pas son public et tente par tous les moyens de le bousculer. Performances, chorégraphies, inspirations mythologiques, littéraires, picturales, tableaux vivants, témoignages de vies, masques, objets en tous genres qui peuplent notre quotidien…Autant de formes qui signent l’identité multiple de cette compagnie.

Notre société occidentale de masse, ses dérives, la consommation à outrance qui nous réduit à l’état de chaire meurtrie, l’exclusion si l’on ne participe pas activement au massacre organisé…autant de prises de conscience qui forment la révolte des spectacles.

A travers les deux performances Didon puis Faust, présentées au théâtre de Vanves il est d’abord question de consommation.

Si la première s’inspire du personnage de Didon ; personnage mythologique qui se donna la mort après que son bien-aimé Enée le quitta en quête d’un nouveau royaume, il s’agit bel et bien de la transformation monstrueuse que peuvent exercer la douleur, l’incompréhension, l’abandon, sur nos corps. Didon, prostitué de bas étage, fait tout pour ressembler à Nicole Kidman, égérie d’un de ses clients. La reconstitution d’une salle de bain dans les toilettes du théâtre, nous plonge dans l’intimité exécrable de ce prostitué qui s’agite à corps perdu dans la jouissance et le dégoût de son désir. Assis ou debout à quelques centimètres de ce corps nu, meurtri, on soutient le regard de cet homme, devenant ainsi les clients potentiels de sa détresse. Une voix off (en français) crée le lien avec l’univers mythologique, sacré, sacrilège. Mais bientôt une image somptueuse et douloureuse se dessine ; celle de Didon sortant du bain, revêtant une veste de plumes synthétiques, perché sur des talons de pacotille. Un Icare déchu par deux fois…

« Démolisseurs non alignés, peu orthodoxes, sans mitraillette mais guérilleros de la poésie, nous avons grandi sous le drapeau corsaire de P.P. Pasolini, nous voyageons sans but ni boussole »

Ricci/Forte pour le magasine web Inferno (interview réalisée par Camilla Pizzichillo)

Pour Faust, le plateau n’est toujours pas mis à l’honneur et se voit détrôné par les cuisines du théâtre. Une lumière sombre, rougeoyante frappée de sons techno, nous accueille. Bienvenue en enfer. Enfer de la télé-réalité, de la pornographie sous toutes ses formes, de la consommation à outrance… Dans cette cuisine infernale, Faust, un candidat de télé-réalité signe un pacte avec le diable. L’audience, le tube cathodique, nouvelles dopes, vont mener le candidat au sacrifice.

Cuisinant ses légumes phalliques avec provocation, il finira par s’ensevelir de sauce tomate, la poitrine mutilée, prêt à être consommé…La même voix off enveloppe la pièce, telle une dernière prière pour le condamné.

Totalement immergés dans cet espace clos, nous ne pouvons pas échapper à la violence du geste. Le comédien nous tient à la gorge et ne desserre son regard qu’une fois inerte sur le plan de travail, chaire consommable.

On espère que la compagnie sera rapidement réinvitée en France parce qu’il est toujours bon de se sentir bousculés, entourés, choqués, émerveillés, apeurés, choyés, alarmés, engagés, vidés, amusés, époustouflés, désarmés…

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©DR

Wunderkrammer Soap 

1 Didon – 2 Faust
Dramaturgie Ricci/Forte
Direction Stefano Ricci
Répétiteur Marco Angelilli
Avec Giuseppe Satori (Didon) et Piersten Leirom (Faust)

Lundi 27 janvier 2014
A partir de 18h00, toutes les heures jusque 23h00

A l’occasion du Festival Ardanthé (jusqu’au 5 avril 2014)

Théâtre de Vanves – salle Panopée
11 Avenue Jézéquel – 92170 Vanves
M° Malakoff Plateau de Vanves (13)
Réservations 01 41 33 92 91
www.theatre-vanves.fr
www.ricciforte.com

 

 

 

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