Critiques // Critique ・ « George Kaplan » texte et mise en scène de Frédéric Sonntag, au TOP

Critique ・ « George Kaplan » texte et mise en scène de Frédéric Sonntag, au TOP

Jan 24, 2014 | Aucun commentaire sur Critique ・ « George Kaplan » texte et mise en scène de Frédéric Sonntag, au TOP

ƒ Critique Suzanne Teïbi

 

©Bertrand Faure©Bertrand Faure

Le mystère George Kaplan

Une chose saute au visage : le texte George Kaplan est brillant. Les répliques s’agencent en une véritable partition, une mélodie rondement menée et ingénieuse. La pièce se divise en trois parties, aux situations et aux personnages  différents, qui forment cependant un tout remarquablement cohérent. Les trois scènes se répondent, se contaminent, s’enrichissent, sèment le trouble. Leur point de départ : George Kaplan. Leur point d’arrivée : George Kaplan. Entre-temps, une mise en abîme vertigineuse. George Kaplan, le mythe moderne, l’inconscient collectif, le personnage fantôme dans lequel projeter les idéaux politiques d’une société en perte de repères. Gorge Kaplan le symbole de la fiction.

Dans le premier tableau, un groupe d’activistes – le groupe George Kaplan – composé d’individus qui s’effacent derrière l’identité de George, icône de leur cause commune et de la possibilité de brouiller les pistes, tente d’enregistrer une vidéo anonyme pour semer la terreur dans une société qu’ils veulent dénoncer. Mais le groupe n’avance pas, il s’embourbe dans l’inaction à trop vouloir agir efficacement, démocratiquement, collectivement. Dans le second tableau, George Kaplan est à présent le personnage principal de tous les scénarios imaginés par des dialoguistes grassement payés par un client mystère, dans un bureau aseptisé. Dans le dernier tableau, dans un bureau autrement aseptisé, une réunion de crise réunit les membres d’un groupe d’hommes et de femmes influents, qui pourraient être un groupe d’invisibles qui tirerait en réalité les ficelles du pouvoir d’une puissance mondiale. L’objet de la crise : l’apparition, dans la société, d’une multitude d’individus dont le nom serait George Kaplan. Après de rapides recherches, ce qu’ils trouvent sur ce nom les lancent – et nous lancent, par la même occasion – sur des pistes mystérieuses.

Le complot George Kaplan existerait-il vraiment ? Dans la vraie vie ? Plus celle de la pièce, mais celle des spectateurs ? Les recherches menées dans la fiction auraient-elles un lien avec la réalité ?

À l’épreuve du plateau 

Si Frédéric Sonntag écrit un texte brillant à la lecture, l’impact est moins fort à l’épreuve du plateau. Sur scène, tout s’organise autour d’une grande table, à laquelle les comédiens, partie après partie, restent bloqués : la table de réunion des activistes, la table de brainstorming des scénaristes, la table de réunion du groupe d’influents. Les situations, qui n’existent que par la parole, peuvent essouffler le spectateur qui assiste en témoin à trois moments de crise de chacun de ces groupes. Le deuxième tableau, en sur-jeu permanent, prend les traits d’une blague, peu importe sa fin. On comprend que le rapport réalité/fiction est particulièrement mis au travail ici, mais il semble difficile de faire dire quelque chose de plus profond à cette scène avec ce traitement caricatural.

Globalement, la proposition de mise en scène de Frédéric Sonntag n’apporte pas de nouveau regard au projet d’écriture George Kaplan. Sur le plateau, tout est mis en œuvre pour aller stricto sensu dans le sens du texte, dont la mise en scène s’empare de manière assez sage et lisse, sans surprise. Elle ne le dépasse pas, elle l’anecdotise même par moments. De fait, elle l’illustre, à l’image de l’utilisation de la vidéo, après chaque tableau, qui agit ainsi en conclusion, mais n’apporte rien de pertinent à ce qui a précédé. En donnant à voir des images très concrètes, elle limite l’imaginaire que le texte peut produire sur le spectateur, et appauvrit le propos.

George Kaplan

Texte et mise en scène : Frédéric Sonntag
Création vidéo : Thomas Rathier
Création musicale : Paul Levis
Création lumière : Manuel Desfeux
Scénographie : Marc Lainé
Costumes : Luce Noyer
Avec : Lisa Sans, Fleur Sulmont, Alexandre Cardin, Florent Guyot, Jérémie Sonntag

Jusqu’au 25 janvier 2014 à 20h30

Théâtre de l’Ouest Parisien
1, place Bernard Palissy – 92100 Boulogne Billancourt
Métro Boulogne – Pont de Saint-Cloud
Réservations : 01 46 03 60 44
www.top-bb.fr

 

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