Festival Teatro a Corte

ƒƒ Critique Dominika Waszkiewicz

Pour fêter les 300 ans de la signature du traité d’Utrecht, le Festival Teatro a Corte propose une vitrine hollandaise. Ainsi, l’équipe de Beppe Navello a accueilli, les 19, 20 et 21 juillet derniers, la surprenante proposition de la jeune metteure en scène Alexandra Broeder.

« Nous tenons à vous signaler l’affaire suivante:

Depuis quelques jours, certaines lignes d’autobus s’écartent de leur itinéraire quotidien. Personne ne sait où ces cars se trouvent pendant leur absence. Certains passagers ont disparu sans laisser de traces. Les voyageurs qui ont réussi à revenir, semblent à peine se souvenir de ce qui leur est arrivé. Les rares récits confus témoignent de chuchotement d’enfants, de bruissement inquiétant d’arbres et de déclics nerveux d’appareils-photo.

Une enquête a été lancée pour résoudre ces disparitions mystérieuses. Ceux qui ont l’intention de voyager en car prochainement, soyez avertis : cela pourrait très bien être votre dernière navette…… 

Message terminé »

L’expérience de la peur ou une plongée au cœur du fantastique

© Kamerich & Budwilowit

La navette s’enfonce dans le parc régional de la Mandria, ancienne réserve de chasse royale près de Turin. Entre les chênes pédonculés et les graciles bouleaux, apparaissent des têtes blondes. Jeans, chemise blanche et bottes en caoutchouc. Silhouette unique ou petit groupe, les enfants nous regardent. On se souvient d’images de films d’épouvante, d’enfants-fantômes dans des forêts ressemblant justement assez à celle-ci. On imagine ce qui a pu se passer ici. Et on frémit à la perspective de découvrir l’indicible et l’insoutenable.

Certains pénètrent dans le bus maintenant à l’arrêt. Un par un, ces visages sévères nous fixent, sans ciller. Présence gênante et oppressante, ils parviennent, sans un mot ou presque, à créer une atmosphère angoissante, hitchcockienne. Rien n’est dit mais tout se devine au travers des sensations proposées par la performance. Le malaise et l’attente engendrent un sentiment étrange frisant la peur. On se sent observé, guetté par ces yeux puérils et pourtant fixes.

Le passionnant travail d’Alexandra Broeder permet de poser la question du regard des enfants sur les adultes. Ces comédiens de 8 à 14 ans nous tendent un miroir et nous invitent à nous mettre en danger en exploitant notre propre imaginaire, Through the Looking-Glass…

Une expérience unique révélatrice du talent fou d’une artiste à suivre impérativement.

 
„WasteLand“
and they will be led by a child
Conception et mise en scène: Alexandra Boeder
Assistant artistique: Jansje Meijman
Manager financier: Marc Meijer
Manager de production: Floortje Halters
Mentor des enfants: Nikita Oldert
Producteur: Theaterzaken Via Rudolphi
Trente enfants, formés dans le cadre d’ateliers, jouent à tour de rôle
alexandrabroeder

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