Critiques // Critique • « Münchhausen, mensonge collectif » au Théâtre de l’Opprimé

Critique • « Münchhausen, mensonge collectif » au Théâtre de l’Opprimé

Oct 18, 2013 | Aucun commentaire sur Critique • « Münchhausen, mensonge collectif » au Théâtre de l’Opprimé

ƒƒ critique Rachelle Dhéry

 © DRSélection Münch 1

S’emparer du légendaire Baron de Münchhausen, qui plus est, au théâtre, est un pari osé et risqué. J’invite d’ores et déjà ceux qui ne le connaissent pas encore à le découvrir, que ce soit dans le film de Terry Gilliam sorti en 1989 ou dans l’œuvre de l’écrivain allemand Rudolf Erich Raspe, en 1785.

La Compagnie Grand Théâtre a souhaité, à son tour, s’inspirer du personnage mythique aux extraordinaires aventures. On y retrouve un baron piégé dans les limbes de son âme, au sein d’un Manoir-livre, tiraillé par les muses de son inspiration pour qu’il retrouve le goût des histoires. De nouvelles histoires, ce serait bien. Sauf que le baron est piégé, tel le personnage d’un livre qu’il incarne, et ressasse, en boucles, ses éternelles mêmes aventures. Sur la lune, avec Vénus, avec le sultan… Et quand, en plus, une muse de la réalité entre en guerre avec les muses de l’imaginaire, on assiste alors à un vrai combat intérieur.

Sur scène, des caisses en bois s’empilent et se désempilent pour recréer l’illusion des souvenirs du Baron. Des échelles permettent de gagner en hauteur à volonté. Des lumières-lanternes sont maniées par les personnages et le tout nous laisse comme une image de grenier, depoussiéreux, d’intime. Toute l’action est accompagnée par un musicien accordéoniste et percussionniste. La musique de Joseph Robinne est sombre, presque lugubre, cela rajoute à l’étrangeté du héros. La scénographie est très intéressante, mais le tintamarre permanent des changements de décors, la fatigue naissante des acteurs et surtout les mouvements, gestes et déplacements rendus dangereux par la mise en espace, peuvent sortir le spectateur de l’illusion.

Au final, que penser ? C’est à la fois bourré d’imagination et en tant que tel, un bel hommage au personnage. Ce qui est toutefois regrettable, c’est cette volonté, très fidèle à notre culture, de vouloir tout analyser, parfois au détriment du récit. L’équipe a eu une psychanalyse plutôt fine du héros et de son histoire, de son futur probable, mais la part d’enfant qui se trouve en chacun de nous, spectateurs, est presque déçue. Où se trouve l’aventure sans le message, le héros de notre passé sans ses questionnements, le Baron de Münchhausen dépourvu de matérialité ? Malgré tout, le choix assumé l’est parfaitement et en ce sens, mérite tout notre respect. Peut-être faut-il faire attention au titre d’un spectacle. Je m’étais arrêtée à « Münchhausen » et avait occulté le « mensonge collectif ». En effet, ce que la compagnie nous a donné à voir, c’est un Münchhausen, héros et prisonnier de sa propre histoire, dans son livre, et ne laisse aucun doute sur la non-réalité de son existence et de ses aventures.

Münchhausen, mensonge collectif 
Ecriture collective dirigée par Julien Luneau
Mise en scène collective dirigée par Elsa Robinne
Avec Jean Barlerin Le Baron, Clément Beauvoir Karl, Odile Ernoult Fu, Etienne Luneau Herman, Twiggy Mauduit Sol, Joseph Robinne (accordéon, percussions) Jo, Marie-Pierre Rodrigue Watt
Création inspirée des Aventures extraordinaires du Baron de Münchausen de G. A. Bürger, traduction T. Gautier fils, Décors Nicolas Hubert, Musique Joseph Robinne
Prix du public ex-aequo – Prix théâtre 13 / Jeunes metteurs en scène 2013
1h25 sans entracte
 
Jusqu’au 27 octobre
Du mercredi au samedi à 20h30 – Dimanche à 17h – Relâche les 18 et 24 octobre
Théâtre de l’Opprimé
78 rue du Charolais
75012 Paris
Métro : Reuilly Diderot, Montgallet, Dugommier, gare de Lyon

01 43 40 44 44

www.theatredelopprime.com

 

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