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Critique • « Ce soir, il pleuvra des étoiles » d’Alexandre Martin-Varroy au Vingtième théâtre

Mai 05, 2012 | Un commentaire sur Critique • « Ce soir, il pleuvra des étoiles » d’Alexandre Martin-Varroy au Vingtième théâtre

Critique de Dominika Waszkiewicz

Rafraîchissant saut dans le temps

Voici une belle ambition pour les quatre comédiens-musiciens : mettre en scène, sous forme de spectacle musical, les trois conflits que sont 1870, 14-18 et 39-45.

Ainsi, le premier tableau s’ouvre sur deux jeunes gens découvrant une malle et les trésors qu’elle renferme : souvenirs d’un autre temps, souvenirs de la guerre. Et voici les deux comédiens (Marie-Pierre Rodrigue et Alexandre Martin-Varroy) qui nous embarquent, à rebrousse-temps, dans un voyage à travers l’Histoire. Entre les correspondances intimes, les extraits littéraires et les chansons populaires qui ne le sont plus pour nous, nous découvrons un univers un peu sépia et lointain mais baigné d’une bonne dose d’humanité. Dans un rythme soutenu, s’enchaînent les mots de Victor Hugo, de Zola, de Clémenceau ou les paroles de Roland Tessier. Alix Merckx à la contrebasse et Romain Molist au piano, réactualisent, avec une belle simplicité, les arrangements d’antan. On nous parle de Mata-Hari, fusillée au petit matin, on nous chante les verveines des fossés de Vincennes

Le deuxième tableau laisse place à la der des ders et à ses Paroles de Poilus. Un simple manteau de soldat, trop grand, marque le désarroi du jeune homme qui va devoir affronter la sale mort des tranchées, en laissant derrière lui son amour, et la vie. Tout fout l’camp ! Depuis la lettre de mobilisation générale du 2 août 1914 à la chanson de Craonne, que les collégiens présents dans la salle ont reconnue, le spectateur assiste à la déconfiture du Poilu qui pensait revenir vite et qui ne reviendra pas.

Alix Merckx enchaîne ensuite sur un solo de contrebasse qui prend des accents soudain yiddish installant le décor esquissé d’une France sous l’occupation allemande. Entre comique et tragique, nous parviennent les paroles satiriques de Goergius caricaturant Hitler ou les poignants extraits des Paroles de l’Ombrerecueillis par Jean-Pierre Guéno. Mais, ne nous laissons pas entraîner dans le brouillard de la mélancolie et laissons les délicates notes du petit bal perdu, interprété au piano par Romain Molist, se fondre doucement dans les rythmes allègres de Maurice Chevalier.


Une belle énergie… pas toujours canalisée

 

Malgré quelques imprécisions techniques et autres fausses notes, le spectateur s’émerveille de tant de dynamisme : les quatre talentueux artistes nous donnent tout et chaque saynète s’incarne avec vérité et émotion. Mais, en dépit de la volonté de restituer une cohérence chronologique au spectacle, l’ensemble reste assez décousu et la continuité narrative fait défaut. En effet, nous aimerions que toute cette humanité, habillement diaprée par la maîtrise du jeu et le subtil arrangement musical nous parvienne aussi par des repères plus dramatiques. Où sont passés ces deux jeunes gens découvrant le contenu de la malle de leur grand-mère ? Et qui sont, pour eux, les personnages plus ou moins anonymes qui défilent sur les planches à leur suite ? Les tableaux se suivent sans véritable trame et nous restons un peu englués dans le maelstrom de nos émotions, entre le rire et les larmes.

Le décor et les costumes restent, en outre, assez discrets et fonctionnent par touches de sens, ce qui ne tend pas à renforcer l’unité du spectacle. Pourquoi, par exemple, les draps blancs qui couvraient les meubles sont-ils repliés à la fin ? Est-ce à dire que la page des guerres est tournée et que le présent peut reprendre sa place ? Mais alors, où réside l’expression de ce désir de dénoncer les atrocités belliqueuses ?

En somme, nous passons un moment agréable, très rafraîchissant et plein de vie et le chaos organisé de cette 1h20 s’écoule au pas de charge. Le spectateur ressort, fredonnant des airs pas tout à fait oubliés…

Quand un soldat s’en va t-en guerre, il a… !


« Ce soir, il pleuvra des étoiles » quand la guerre se met à chanter
Spectacle d’Alexandre Martin-Varroy
Mise en scène  Patrick Alluin
Chorégraphies  Mariejo Buffon
Costumes  Benjamin Lefebvre
Lumières  Éric Charansol
Avec  Alexandre Martin-Varroy, Alix Merckx, Romain Molist, Marie-Pierre Rodrigue

Du 3 mai au 7 juin 2012 à 14h30 (les jeudis)

Le Vingtième théâtre
7 rue des plâtrières
75020 PARIS
Tél : 01 43 66 01 13
Métro Ménilmontant
www.vingtiemetheatre.com

 

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