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Critique• « Les descendants » d’après Sedef Ecer, mis en scène par Bruno Freyssinet au Théâtre de l’Aquarium

Mai 03, 2012 | Aucun commentaire sur Critique• « Les descendants » d’après Sedef Ecer, mis en scène par Bruno Freyssinet au Théâtre de l’Aquarium

Critique Bruno Deslot

Le poids de l’histoire

Sedef Ecer interroge le passé à la lumière des étoiles, dans un observatoire assez singulier, où se rencontrent des orphelins de guerre élevés loin de chez eux. Enfants de bourreaux ou victimes d’un génocide, héritiers d’une histoire complexe, ils en portent les stigmates et cherchent à en exhumer les restes. A la croisée des chemins, l’histoire de la Turquie, l’Arménie et l’Allemagne se retrouvent en proie à un questionnement cherchant à légitimer l’existence des descendants que les guerres de ces pays ont enfantés.

copyrigth Benoit Fortrye

 A l’avant-scène, un demi-cercle dessine une partie de l’observatoire autour duquel les comédiens font coulisser un axe concave étoilé, représentant la coupole de l’édifice. Ce lieu semble clos en apparence mais l’espace de jeu ne se limite pas à cette circonférence, il va bien au-delà, jardin, cour et fond de scène sont habités par les fantômes du passé.  Mais quel passé ? Un passé qui ne passe pas ? (Eric Conan et Henry Rousso, Vichy, un passé qui ne passe pas) Un passé ayant forgé un futur fondu dans la négation, le mensonge ? Les interrogations sont nombreuses à ce sujet entre les protagonistes interrogeant leur passé ! Un dialogue sur l’héritage de l’histoire plus qu’un docu-fiction traitant de la mémoire, de l’histoire et de l’oubli, tisse la toile d’un spectacle  ouvrant le chemin des possibles permettant d’emprunter les routes sinueuses des pages sombres du XXe siècle Turc, Arménien et Allemand.

Les descendants, un travail à trois mains né d’une rencontre entre la dramaturge turque Sedef Ecer, le documentariste arménien Serge Avédikian et le metteur en scène français Bruno Freyssinet, « portant sur la conscience de l’héritage qu’une société laisse aux générations suivantes, sur la mémoire collective, sur la reconnaissance de l’autre, la nécessité du dialogue entre des générations innocentes, mais qui portent comme un fardeau une Histoire de bourreau ou de victimes. » Pour cette création collective, Bruno Freyssinet a fait le choix « de composer une grande fresque historique en trois temps et de (se) servir d’un chœur final, (s’) inspirant des dramaturges antiques ». Mais peut-on parler de fresque ? Le collage, l’assemblage, la juxtaposition des dialogues semblent davantage convenir à une écriture que l’on pourrait apparenter à une dramaturgie fragmentaire dans la mesure où l’architecture de l’œuvre se situe dans la tendance actuelle et pas si récente que cela si l’on remonte aux auteurs comme Kleist, Büchner ou Lenz qui déjà recouraient à ce type de procédé. Ces juxtapositions produisent bien un effet de kaléidoscope ou de prisme, mais durant les 1h30 de spectacle on peine à trouver les jointures, qui constituent dans ce genre tout l’intérêt de ce type d’écriture. Les vides narratifs ne sont pas gênants au contraire ils pourraient permettre aux spectateurs d’en accuser les béances pour mieux leur laisser le soin de l’éventuelle reconstitution. Mais ici, on a très rapidement le sentiment que l’architecture de l’ouvrage a été pensée, mais que le gros-œuvre est totalement inexistant. Les langues arméniennes, turques, allemandes et françaises se croisent sans réellement se rencontrer alors qu’elles pourraient offrir un champ choral chargé d’une émotion totalement absente. L’ensemble est sec comme un coup de trique.

Au fil des représentations, il faut souhaiter à toute l’équipe artistique qu’elle trouvera le rythme et la cohérence nécessaires à justifier ses désirs de dialoguer avec le passé.

Les descendants
D’après Sedef Ecer
Mise en scène Bruno Freyssinet
Documentariste Serge Avédikian
Avec Julia Penner, Andreas Worsch (Allemagne), Tatevik Ghazarian, Vardan Mkrtchian (Arménie), Hadrien Bouvier, Gérard Torikian (France), Selin Altiparmak, Serra Yilmaz (Turquie).

Du 2 au 27 mai 2012

Théâtre de l’Aquarium
Route du Champ de Manœuvre
75012 Paris
Réservations 01 43 74 99 61
Métro Château de Vincennes ligne 1 + navette gratuite Cartoucherie
www.theatredelaquarium.net

 

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